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Full text of "Sur l'emploi de l'aimant pour l'extraction des corps métalliques des corps étrangers métalliques de l'oeil [electronic resource]"

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SUR  L'EMPLOI  DE  L'AIMANT 


POUR  l'extraction 

DES  CORPS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES 

DE    L  '  CE  I  L 


Bouhloton.  —  Imprimeries  réunies, 


SUR 


L'EMPLOI  DE  L'AIMANT 

tour  l'extraction 

D  SS 

CORPS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES 

DE  L'ŒIL 


PAU 

Le  Dr  GALEZOWSKI 


PARIS 

ANCIENNE  LIBRAIRIE  GERMER  BAI  LLIÈRE  et  C,c 

FÉLIX  ALCAN,  ÉDITEUR 

108,    BOULEVARD    SAINT-GERMAIN,  108 
Au  coin  do  la  rue  Hautofcuillo. 

1886 

Tous  droits  rcjscrvùs 


Digitized  by  the  Internet  Archive 

in  2014 


https://archive.org/details/b21645978 


L'EMPLOI  DE  L'AIMANT 


POUR  l'extraction 
DES  COUPS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL 


La  chirurgie  oculaire  a  fait  dans  ces  dernières  années 
d'immenses  progrès,  et  une  partie  de  ces  progrès  est  due 
incontestablement  aux  perfectionnements  apportés  dans 
l'instrumentation.  L'emploi  d'instruments  aimantés  dans 
l'extraction  des  corps  étrangers  en  fer  ou  en  acier  qui  se 
logent  dans  l'œil  est  une  des  plus  belles  conquêtes  de  la  chirur- 
gie moderne.  Les  résultats  merveilleux  qu'on  obtient  jour- 
nellement dans  les  blessures  de  ce  genre,  prouvent  combien 
est  importante  cette  innovation,  surtout  quand  on  pense 
que,  sans  les  instruments  aimantés,  l'œil  souvent  aurait  été 
perdu  complètement.  Quelquefois  on  serait  obligé  de  pra- 
tiquer des  opérations  pouvant  déformer  la  pupille  et  laisser 
des  troubles  visuels,  et  qui  sont  faciles  à  éviter  par  l'emploi 
de  l'aimant. 

L'extraction  des  corps  étrangers  avec  l'aimant  se  fait 
aujourd'hui  très  fréquemment  aux  États-Unis  et  en  Alle- 
magne depuis  que  White-Cooper  *,  Mac'Keown2  etPooley3  ont 
fait  d'intéressantes  recherches  à  ce  sujet.  Hirschberg,  de  Ber- 
lin, vient  de  publier  un  volume  très  intéressant  sur  cette  ma- 
tière, où  il  a  réuni  tous  les  cas  connus  qui  ont  été  publiés  dans 
les  différents  pays  sur  ce  même  sujet,  et  nous  pensons  que  ce 
livre  sera  consulté  avec  fruit  par  tous  les  ophtalmologistes. 

1.  White-Coopcr,  Lancet,  1859,  p.  388. 

2.  Mac  Keown,  Uristish  med.  Journal,  1871. 

3.  Pooley,  Archiv  von  Knapp  u.  Hirschberg,  X.  18807. 

1 


2  COItrS  ÉTRANGERS  METALLIQUES  DE  L'ŒIL. 

En  France,  l'application  de  l'aimant  dans  les  opérations 
des  yeux  n'est  pas  encore  très  répandue,  et  je  crois  avoir  été 
un  des  premiers  qui  aient  employé,  et  avec  un  grand  succès, 
l'aimant  à  l'extraction  des  paillettes  de  fer  implantées  dans 
les  membranes  internes  des  yeux,  et  notamment  dans  la 
rétine.  Le  cas  était  on  ne  peut  plus  intéressant,  le  cristallin 
était  resté  après  la  blessure  assez  longtemps  transparent,  ce 
qui  m'avait  permis  d'examiner  le  fond  de  l'œil  avec  l'ophtal- 
moscope  et  de  définir  exactement  la  position  occupée  par  le 
corps  étranger  sur  la  rétine.  C'est  alors  que,  incisant  la 
sclérotique  entre  les  muscles  droit  supérieur  et  droit  ex- 
terne, et  introduisant  une  sonde  aimantée  dans  l'œil,  j'ai 
pu  retirer  le  morceau  d'acier  au  dehors;  après  quoi  l'œil 
a  complètement  guéri,  et  aujourd'hui,  après  que  son  cristal- 
lin cataracté  a  été  extrait,  le  malade  voit  parfaitement  bien 
de  son  œil  blessé.  Ce  lait,  du  reste,  sera  publié  tout  au  long 
vers  la  fin  de  ce  travail. 

I.  —  Extraction  des  paillettes  de  fer  de  la  cornée. 

L'aimant  peut  être  employé  dans  l'extraction  des  corps 
étrangers  implantés  dans  la  cornée,  mais  son  utilité  ne 
peut  être  réelle  que  lorqu'il  s'agit  des  morceaux  de  fer  bien 
profondément  engagés  dans  l'épaisseur  de  la  cornée  et  lors- 
qu'il y  a  à  craindre  qu'en  grattant  la  plaie  cornéenne  et  en 
cherchant  à  déchalonner  le  corps  étranger,  on  ne  le  laisse 
tomber,  dans  la  chambre  antérieure,  ce  qui  pourrait  être 
funeste  pour  l'œil. 

En  général,  l'extraction  des  morceaux  de  fer  de  la  cornée 
n'est  point  facile,  car  ces  corps  sont  généralement  très  poin- 
tus, irréguliers,  anguleux  et  dentelés  sur  leurs  bords,  ce  qui 
fait  qu'ils  sont  incrustés  très  profondément  dans  les  diffé- 
rentes couches  de  la  cornée,  et  ne  se  détachent  qu'après 
qu'on  les  a  déchatonnés  et  dégagés  de  la  plaie. 

Dans  ces  cas,  habituellement,  la  dissection  de  la  plaie 
cornéenne  avec  une  aiguille  à  cataracte  suffit  pour  dégager 


EXTRACTION  DES  PAILLETTES  DE  FER  DE  LA  CORNÉE.  3 

le  corps  étranger,  et  engager  au  dernier  moment  la  pointe 
de  l'aiguille  sous  la  paillette  de  fer  et  on  s'en  servira  comme 
d'un  levier  pour  faire  sortir  le  corps  étranger  au  dehors. 

Quelquefois  pourtant,  ce  dernier  temps  de  l'opération 
devient  très  difficile,  et  je  dirai  même  dangereux,  surtout  si 
la  pointe  du  corps  étranger  métallique  touche  à  la  membrane 
deDescemet,  ou  si  elle  fait  même  une  saillie,  à  travers  la 
plaie  de  la  cornée  dans  la  chambre  antérieure.  Dans  ces 
conditions,  la  dissection  doit  être  arrêtée  à  temps  pour  que 
le  morceau  de  fer  ne  tombe  pas  dans  la  chambre  antérieure; 
et  c'est  ici  que  l'emploi  d'un  aimant  peut  être  réellement 
très  utile.  Il  suffit,  en  effet,  de  le  rapprocher  de  la  paillette 
de  fer  déjà  déchatonnée  pour  qu'il  sorte  au  dehors. 

C'est  de  cette  façon  que  nous  avons  agi  chez  un  malade 
qui  s'est  présenté  à  nous  dans  des  conditions  relativement 
peu  favorables,  car  il  s'agissait  d'une  blessure  datant  du 
douzième  jour,  et  où  la  cornée  avait  déjà  subi  une  suppura- 
tion assez  intense  autour  du  corps  étranger,  qui  était  profon- 
dément enchatonné  dans  l'épaisseur  de  la  cornée.  Nous  nous 
sommes  servi  au  dernier  moment  de  l'aimant  et  nous  avons 
eu  la  satisfaction  de  retirer  la  paillette  de  fer.  Cette  opération 
a  été  suivie  d'une  amélioration  très  rapide,  et  l'œil  a  été 
complètement  guéri,  en  ne  conservant  qu'un  leucome. 

Les  corps  étrangers  sont  projetés  souvent  avec  une  telle 
violence,  qu'ils  traversent  de  part  en  part  la  cornée  et  vont 
se  loger  soit  dans  la  chambre  antérieure  soit  dans  une  partie 
quelconque  de  l'iris.  Leur  extraction  généralement  devient 
dans  ce  cas  très  difficile,  souvent  excessivement  dangereuse; 
en  ayant,  au  contraire,  recours  aux  instruments  aimantés,  on 
arrive  facilement  à  vaincre  les  obstacles  et  on  sauve  Tes  yeux, 
comme  on  peut  en  juger  par  le  fait  suivant  recueilli  à  ma 
clinique  par  mon  sous-chef  de  clinique,  M.  Despagnet,  où 
après  l'excision  de  l'iris  il  a  fallu  encore  rechercher  la 
paillette  de  fer  avec  l'aimant  : 


A- 


CORPS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 


OBSERVATION 

Corps  étranger  de  la  chambre  antérieure  et  de  Viris; 
extraction  à  l'aide  d'un  aimant.  Guérison. 

M.  P...,  ouvrier  mécanicien,  âgé  de  quarante-trois  ans, 
reçoit  le  8  mai  1885  un  éclat  d'acier  sur  l'œil  gauche.  Pro- 
jeté avec  une  grande  violence,  il  traverse  la  cornée  dans  sa 
partie  inférieure,  vers  le  méridien  vertical,  et  vient  se  placer 
entre  l'irisetlapartieinférieuredelacornée.  Dès  le  lendemain, 
l'inflammation  devient  très  intense,  et  la  cornée  prend  une 
teinte  opalescente  dans  tout  son  segment  inférieur.  Ce  n'est 
que  trente-six  heures  après  que  le  malade  se  présenta  à  la 
consultation  de  la  rue  Dauphine,  et  malgré  le  trouble  de  la 
cornée,  on  lui  fait  subir  l'opération  de  l'extraction  du 
corps  étranger. 

Le  malade  ayant  été  endormi,  on  lui  pratiqua  d'abord  l'inci- 
sion large  de  la  cornée  avec  le  couteau  de  Grœfe  à  l'endroit 
de  la  blessure,  et  on  introduisit  l'aimant  dans  la  chambre 
anlérieure.  Celte  première  tentative  resta  sans  aucun  ré- 
sultat. A  ce  moment,  on  a  saisi  l'iris  à  travers  la  plaie  avec 
une  petite  pince  pupillaire  et  on  l'a  excisé.  En  appliquant 
l'aimant  sur  la  portion  de  l'iris  excisé,  on  n'a  pas  trouvé  le 
corps  étranger.  C'est  alors  que,  introduisant  pour  la 
seconde  fois  l'aimantdans  la  plaie,  on  a  pu  retirer  le  morceau 
d'acier,  qui  s'était  évidemment  arrêté  entre  les  lèvres  de 
la  plaie  cornéenne.  Ce  morceau  d'acier  était  d'une  forme 
allongée,  un  peu  irrégulière,  avec  le  bout  un  peu  tordu  ;  long 
de  4  millimètres,  il  présentait  une  largeur  de  2  à  3  milli- 
mètres sur  les  différentes  parties  de  sa  longueur. 

Bien  que  l'on  eût  extrait  le  morceau  d'acier,  l'inflammation 
de  l'œil  persista  pendant  plus  de  deux  semaines  avec  une 
extrême  violence,  à  un  tel  point,  qu'on  a  pu  croire  un  mo- 
ment à  l'évolution  d'un  phlegmon.  Grâce  pourtant  aux  anti- 
phlogistiqucs,  à  l'application  de  sangsues,  plusieurs  fois 
répétée,  l'instillation  d'atropine  et  d'éserinc,  aux  frictions 
avec  l'onguent  napolitain  bclladonné,  et  aux  douches  d'eau 
phéniquée  pulvérisée,  administrées  plusieurs  fois  par  jour, 
tous  les  accidents  inflammatoires  ont  été  enrayés,  de  sorte 
que,  vers  la  moitié  de  juin,  la  maladie  entra  dans  la  voie  de 
la  guérison  complète.  —  10  juillet.  L'œil  est  guéri,  mais,  il 
reste  un  large  leucome,  adhérent,  à  la  moitié  inférieure  de 


EXTRACTION  DES  PAILLETTES  DE  FER  DE  LA  CORNÉE.  5, 


la  cornée,  qui  masque  en  partie  la  pupille.  En  dilatant  la 
pupille  avec  l'atropine,  on  voit  le  fond  de  l'œil  normal.  La 
vue  de  cet  œil  est  sensiblement  affaiblie  à  cause  de  la  défor- 
mation irrégulière  de  la  cornée.  À  l'aide  d'un  verre  convexe 
numéro  4  Dioptries,  le  malade  peut  lire  quoique  difficilement 
te  caractère  numéro  5  de  l'échelle. 

Il  résulte  de  mes  statistiques,  que  le  plus  grand  nombre  des 
paillettes  de  fer,  des  morceaux  d'acier  qui  atteignent  la 
cornée,  ne  pénètrent  pas  très  profondément;  ils  se  fixent 
généralement  à  la  surface  même  de  cette  membrane,  ou  bien 
ils  sont  arrêtés  dans  les  couches  profondes  et  tout  près  de  la 
membrane  de  Desceme-t.  Placés  dans  ces  conditions,  les  corps 
étrangers  peuvent  en  général  être  enlevés  avec  une  aiguille 
un  peu  forte  et  dont  la  pointe  aura  été  préalablement 
aimantée.  Il  y  a,  en  effet,  des  avantages  réels,  à  se  servir 
d'instruments  aimantés  pour  l'extraction  des  paillettes  de 
fer  de  la  cornée,  car  une  fois  qu'ils  se  trouvent  dégagés  et 
déchatonnés  de  leur  loge,  ils  se  trouvent  attirés  par  l'aiguille 
aimantée  vers  leur  pointe,  et  le  résultat  n'est  que  plus  rapide 
et  plus  brillant. 

Hirschberg  se  sert  dans  ces  cas  d'une  pile  électrique  parti- 
culière, à  laquelle  se  trouve  fixé  par  un  fil,  l'instrument 
aimanté,  qu'il  approche  de  la  plaie  faite  préalablement  dans  la 
cornée,  à  l'endroit  du  corps  étranger.  Il  me  semble  que  cette 
augmentation  de  la  force  aimantée  pour  l'extraction  des 
morceaux  d'acier  de  la  cornée  est  tout  à  fait  superflue,  et 
qu'un  simple  instrument,  aimanté  d'avance,  est  bien  suffi- 
sant pour  le  but  qu'on  se  propose  d'atteindre. 

Je  me  sers,  habituellement,  de  plusieurs  instruments  ai- 
mantés pour  l'extraction  des  corps  étrangers  de  l'œil.  Je 
les  ai  fait  construire  par  M.  Collin,  et  on  trouve  dans  une  boîte 
à  part  réunis  tous  les  instruments  que  voici  (fig.  1)  : 

1°  Une  aiguille  à  corps  étrangers,  un  peu  forte  au  bout; 

2°  Une  petite  renette,  instrument  ressemblant  à  celui  dont 
se  servent  les  vétérinaires  pour  évidement  du  sabot; 

3°  Une  pince  droite  fine  avec  de  petits  mors  au  bout; 

4°  Une  sonde  avec  un  bout  fin,  olivaire,  pour  l'extraction 


6  CORrS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 

des  corps  étrangers  de  la  chambre  antérieure  et  du  corps 
vitré. 

5°  Une  curette  en  acier  aimantée. 

Ces  quelques  instruments  doivent  être  tenus  dans  une  boite 
spéciale,  soit  en  bois  soit  en  verre,  afin  que  la  force  aimantée 
ne  se  perde  pas.  On  trouvera  cette  boîle  complète,  très  habile- 
ment confectionnée  chez  M.  Collin,  6,  rue  de  l'École-de-Mé- 
decine.  11  est  bien  entendu,  que  de  temps  en  temps,  par 
exemple,  tous  les  cinq  ou  six  mois,  il  sera  prudent  de  s'assu- 
rer si  ces  instruments  n'ont  pas  perdu  leur  pouvoir  d'attrac- 
tion et  au  besoin  on  les  fera  aimanter  à  nouveau. 


Vig.  l. 


M.  Hirschberg  rapporte  six  observations  de  corps  étran- 
gers de  la  cornée  où  il  a  dù  recourir  à  l'aimant.  Quant  à  moi, 
je  puis  dire  que  dans  le  plus  grand  nombre  de  ces  cas  l'extrac- 
tion a  pu  être  pratiquée  sans  que  j'aie  eu  besoin  de  recourir 
aux  instruments  d'autre  nature  qu'une  aiguille  aimantée. 
Une  seule  fois  seulement  la  paillette  de  fer  était  tellement 
profondément  incrustée  qu'il  y  avait  grand  danger  qu'elle 
tombât  dans  la  chambre  antérieure,  et  c'est  alors  seulement 
que  j'ai  eu  recours  avec  un  plein  succès  à  un  fort  aimant. 


EXTRACTION  DES  PAILLETTES  DE  FER  DE  LA  CORNÉE.  7 

Voici  ce  fait  : 

ODSERVATION 

Paillette  d'acier  fixée  très  profondément  dans  la  cornée. 
Extraction  avec  un  aimant.  Guérison. 

M.  K...,  ouvrier  serrurier,  âgé  de  trente-deux  ans,  a  reçu 
un  morceau  d'acier  dans  l'œil,  d'un  de  ses  camarades  qui 
travaillait  à  une  rampe  en  fer.  Dès  le  lendemain  il  vint 
me  voir  ;  il  ne  souffrait  pas  beaucoup,  l'œil  était  un  peu  in- 
jecté, et  il  y  avait  de  la  photophobie.  Un  morceau  de  fer  se 
voyait  dans  l'épaisseur  de  la  cornée.  J'y  ai  fait  une  incision 
et  j'ai  cherché  à  le  déchatonner,  mais  sans  résultat.  De  plus, 
je  voyais  l'humeur  aqueuse  se  vider  par  l'incision,  ce  qui  était 
pour  moi  une  preuve  que  le  corps  étranger  faisait  saillie 
dans  la  chambre  antérieure.  Voyant  le  danger  qui  pouvait 
résulter  de  la  chute  de  ce  corps  étranger  dans  la  chambre 
antérieure,  j'ai  agrandi  la  plaie  avec  le  bistouri  fin,  et  j'ai 
essayé  de  saisir  la  paillette  avec  une  pince,  mais  cette  tenta- 
tive ayant  encore  échoué,  j'ai  approché  alors  une  grosse  sonde 
aimantée  de  la  plaie  et  j'ai  eu  la  satisfaction  de  retirer  le  mor- 
ceau de  fer  au  dehors.  Les  suites  de  l'opération  ont  été  des 
plus  simples;  quelque  gouttes  d'atropine,  des  compresses 
froides  et  la  pommade  vaseline  ont  suffi  pour  amener  la 
guérison  de  l'œil. 

En  général,  il  estbondese  servir  des  instruments  aimantés 
même  les  plus  simples,  tels  que  :  aiguille  ou  renette,  pour 
détacher  les  paillettes  de  fer  qui  se  trouvent  soit  à  la  sur- 
face soit  dans  l'épaisseur  de  la  cornée,  car  pendant  la  dis- 
section de  la  plaie  cornéenne  qui  contient  le  corps  étranger, 
ce  dernier  se  trouve  entraîné  par  l'aiguille  aimantée  et  se  dé- 
tache de  la  plaie  plus  facilement  que  par  un  instrument 
ordinaire. 

II.  —  Extraction  «les  paillettes  de  fer  de  l'iris. 

Les  paillettes  de  fer  fixées  dans  l'iris  peuvent  être  quel- 
quefois retirées  complètement  de  cette  membrane  à  l'aide 
d'un  aimant,  surtout  si  elles  ne  sont  pas  enfoncées  trop  pro- 
fondément. Souvent,  dans  ces  cas,  on  peut  voir  l'iris  avec  le 
corps  étranger  se  porter  très  visiblement  en  avant  et  se  rap- 


8  CORPS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 

procher  de  la  cornée,  si  on  approche  de  l'œil  un  forl  aimant. 

Le  fait  suivant  est  un  des  exemples  les  plus  frappants  et 
des  plus  concluants  sur  l'efficacité  des  aimants  dans  l'ex- 
traction des  morceaux  d'acier  de  l'œil.  L'observation  que  je 
rapporte  ici  a  été  recueillie  et  rédigée  par  M.  Despagnet. 

OBSERVATION 

Corps  étranger  implanté  dans  Viris.  Extraction  avec  V  aimant. 

M.  Jean  R...,  vingt-trois  ans,  mécanicien  demeurant  à 
Paris,  était  occupé  à  perforer  le  cercle  d'une  roue  de  fer 
pour  la  boulonner  lorsque  l'instrument  perforant  en  acier 
(fraisse)  se  brise  et  un  éclat  vient  frapper  l'œil  droit.  L'acci- 
dent arrive  le  5  mai  à  deux  heures  de  l'après-midi.  A  trois 
heures  le  malade  se  présente  à  la  consultation.  Sur  le  bord 
pupillaire  externe  droit  et  au  niveau  du  diamètre  horizontal 
on  aperçoit  un  petit  corps  brillant,  implanté  dans  l'iris.  A 
peu  près  vers  le  centre  cornéen  on  reconnaît  le  point  où  il 
est  entré.  En  effet,  on  y  constate  une  tache  blanche  presque 
linéaire  ayant  une  longueur  de  2  millimètres  environ.  La 
plaie  estdéjàencoaptation  parfaite  et  à  la  lampe  on  n'aperçoit 
aucun  suintement  de  l'humeur  aqueuse.  La  chambre  anté- 
rieure est  d'ailleurs  reconstituée  et  a  à  peu  près  les  mêmes 
dimensions  que  dans  l'autre  œil.  La  pupille  est  normale 
comme  grandeur,  et  ses  mouvements,  quoique  un  peu  plus 
lents  que  du  côté  opposé,  sont  parfaitement  visibles  quand  on 
met  le  malade  en  face  de  la  fenêtre.  Le  cristallin  est  transpa- 
rent dans  toutes  les  parties  visibles  de  la  capsule  ne  présente 
aucune  solution  de  continuité.  Le  corps  étranger  est  donc 
arrêté  à  l'iris.  D'ailleurs  nous  en  avons  une  preuve  nouvelle 
dans  les  mouvements  pupillaires  qui  se  font,  avons-nous  dit, 
très  régulièrement,  ce  qui  n'existerait  pas  si  le  morceau  d'a- 
cier avait  pénétré  dans  le  cristallin,  car  il  maintiendrait  l'iris 
fixe  conlrc  la  plaie  capsulaire. 

Pour  l'extraire,  on  l'ait  avec  le  couteau  de  Graefe,  à  la  partie 
supérieure  et  externe,  une  plaie  d'un  centimètre  et  demi  en- 
viron. Aussitôt,  avec  la  sortie  de  l'humeur  aqueuse,  l'iris  se 
projette  dans  la  plaie.  On  introduit  alors  l'aimant  entre  les 
deux  lèvres  de  la  cornée.  En  l'approchant  on  voit  l'iris  se 
porter  fortement  en  dehors.  C'est  le  corps  étranger  qui, 
coiffé  par  l'iris,  et  attiré  par  l'aimant,  produit  ce  mouvement 
de  propulsion.  A  l'aide  de  l'aimant  on  refoule  légèrement 


EXTRACTION  DES  PAILLETTES  DE  FER  DE  L 


l'iris  de  dedans  en  dehors  et  on  décoiffe  le  corps  étn3y$ir 
qui  vient  se  porter  contre  l'aimant  et  se  trouve  retire*au 
dehors.  On  refoule  ensuite  l'iris  dans  la  chambre  antérieure 
à  l'aide  d'un  stylet  et  on  instille  l'éserine;  la  réduction  est 
complète.  Ajoutons  que  pour  faciliter  l'opération  on  avait 
préalablement  instillé  dans  l'œil  la  cocaïne. 

Quant  au  corps  étranger,  c'était  un  morceau  d'acier,  débris 
de  l'instrument  perforant,  sa  forme  est  triangulaire,  et  sa 
hauteur  de  un  millimètre.  Les  bords  taillés  à  pic  sont  irré- 
culiers. 

11  arrive  quelquefois  que  le  morceau  d'acier  se  trouve  im- 
planté dans  l'iris  d'une  telle  façon,  qu'il  ne  peut  pas  être  ex- 
trait sans  que  la  portion  de  l'iris,  dans  laquelle  le  corps 
étranger  se  trouve  implanté,  soit  aussi  enlevée.  Mais  pour  pra- 
tiquer cette  opération,  on  est  obligé  de  saisir  l'iris  avec  la 
pince  el  de  l'exciser  sans  qu'on  ait  immédiatement  la  certi- 
tude que  le  morceau  d'acier  ait  été  extrait  avec  la  portion  de 
l'iris.  Dans  ces  cas  le  recours  à  l'aimant  peut  avoir  aussi 
son  utilité.  Et  en  effet,  en  l'approchant  de  la  portion  de  l'iris 
excisé,  on  verra  ce  dernier  s'attacher  à  l'aimant,  si  le  morceau 
d'acier  se  trouve  compris  dans  le  débris  de  l'iris  excisé. 

Les  choses  se  sont  passées  de  cette  façon  dans  le  cas  sui- 
vant : 


Paillette  de  fer  fixée  dans  la  cornée  et  Viris.  Extraction  avec 
excision  de  Viris.  Guérison. 

Monsieur  S...,  âgé  de  trente-deux  ans,  ouvrier  mécanicien, 
demeurant  à  Paris,  se  présenta  à  la  consultation  de  la  rue  Dau- 
phine,  le  3  juillet  1885,  se  plaignant  d'un  trouble  de  lavue  et  de 
douleurs  périorbitaires,  qu'il  ressentait  depuis  une  dizaine  de 
jours.  11  lui  semble  qu'il  a  reçu  un  corps  étranger  dans  l'œil, 
en  burinant  une  planche  de  fer,  mais  il  ne  peut  l'affirmer, 
car  il  n'a  pas  souffert  sur  le  moment.  Pendant  les  premiers 
huit  jours  le  malade  alla  se  soigner  dans  une  clinique  où 
on  ne  put  apercevoir  le  corps  étranger.  A  notre  premier 
examen,  nous  avons  pu  constater  la  présence  d'une  paillelte 
très  fine  placée  au  bord  inférieur  de  la  cornée,  à  2  millimè- 
tres de  son  bord  opaque,  et  qui  par  un  bout  pénétrait  dans 


OBSERVATION 


I 


10 


CORPS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 


l'iris,  et  par  l'autre  restait  fixée  dans  la  cornée.  L'œil  était  à 
peine  injecté;  et  le  malade  ne  se  plaignait  que  d'une  légère 
pesanteur  et  d'une  cuisson. 

Dès  le  lendemain,  j'ai  pratiqué  l'extraction  du  corps  étran- 
ger. Après  avoir  incisé  la  cornée  avec  le  cout'eau  de  Graefe  à 
la  limite  de  la  partie  transparente  et  tout  près  du  corps  étran- 
ger, j'ai  introduit  l'aimant,  à  plusieurs  reprises,  dans  la 
chambre  antérieure,  mais  sans  aucun  résultat.  C'est  alors  que 
j'ai  saisi  la  portion  de  l'iris  où  se  trouvait  le  corps  étranger, 
je  l'ai  retirée  au  dehors  et  je  l'ai  excisée.  La  pupille  après 
l'excision  s'est  remplie  immédiatement  de  sang  et  on  ne  pou- 
vait pas  savoir  si  la  paillette  de  fer  était  extraite  avec  l'iris 
ou  si  elle  était  restée  dans  la  chambre  antérieure  ou  la  cor- 
née. A  ce  moment  l'aimant  nous  a  rendu  un  service  réel; 
et  en  effet,  je  l'ai  rapproché  de  la  portion  de  l'iris  excisé  que 
je  tenais  au  bout  de  la  pince,  et  j'ai  eu  la  satisfaction  de  voir 
le  lambeau  de  l'iris  s'attacher  à  l'aimant  ;  la  petite  paillette 
d'acier  était  ensuite  facilement  mise  à  nu. 

Les  suites  de  l'opération  étaient  très  simples,  l'œil  a  guéri 
au  bout  de  cinq  jours,  et  le  malade  a  pu  reprendre  ses  occu- 
pations. 

Ces  faits,  et  plusieurs  autres  que  j'ai  observés  dans  ma  clien- 
tèle, montrent  d'une  manière  non  douteuse  que  l'emploi  des 
sondes  aimantées  est  on  ne  peut  plus  précieux  dans  l'extrac- 
tion des  paillettes  de  fer  implantées  dans  l'iris. 

III.  —  Extraction  des  paillettes  de  fer  de  la  conjonctive. 

Les  corps  métalliques  implantés  dans  la  conjonctive  exigent 
rarement  l'emploi  d'instruments  aimantés  :  une  simple  in- 
cision delà  muqueuse  et  une  introduction  d'une  pince  dans 
la  plaie  suffisent  pour  les  retirer  de  la  plaie.  Néanmoins,  en 
procédant  de  cette  manière,  on  s'expose  à  voir  la  plaie  con- 
jonctivale  se  remplir  de  sang  et  masquer  le  corps  étranger. 
Il  est  donc  préférable,  selon  moi,  de  saisir  dans  ces  cas,  avant 
toute  incision,  le  corps  métallique  à  travers  la  conjonctive 
avec  la  pince  aimantée,  et  d'exciser  ensuite  le  tout  avec  une 
paire  de  ciseaux,  quitte  à  suturer  ensuite  la  plaie  conjonc- 
tivale  si  ses  bords  étaient  par  trop  écartés. 


EXTRACTION  DES  CORPS  ÉTRANGERS  DE  LA  SCLÉROTIQUE.  11 

C'est  de  cette  façon  que  j'ai  procédé  dans  le  cas  suivant  : 

ODSERVATION 

Éclat  de  fonte  implanté  dans  la  conjonctive.  —  Extraction. 

M.Fossard,  vingt-cinq  ans,  mécanicien,  rueMarcadet,  37,  à 
Paris,  en  burinant  de  la  fonte  en  reçoit  un  éclat  dans  l'œil  gau- 
che. Le  corps  étranger  vient,  s'implanter  assez  profondément 
dans  la  conjonctive.  Il  fait  une  légère  saillie  àla  surface  de  la 
muqueuse  mais  pas  suffisante  pour  qu'on  puisse  le  saisir  avec 
une  pince.  On  essaye  de  l'extraire  avec  l'aimant,  espé- 
rant peut-être  que  ce  n'est  point  de  la  fonte  mais  un  débris 
de  l'instrument  servant  à  buriner,  mais  l'aimant  reste  sans 
action.  On  dut  donc  saisir  le  corps  étranger  à  l'aide  d'une 
pince  aimantée  et  exciser  la  conjonctive  qui  contenait  le  mor- 
ceau de  fer  à  l'aide  d'une  paire  de  ciseaux.  On  introduisit 
ensuite  une  seconde  fois  l'aimant  dans  la  plaie,  mais  sans 
rien  retirer.  Le  stylet  ne  révélait  plus  la  présence  d'aucun 
corps  dur.  Le  corps  étranger  avait  été  retiré  en  entier,  ce 
que  nous  avons  pu  constater  en  approchant  le  stylet 
aimanté  du  lambeau  conjonctival  excisé  :  la  paillette  a  été 
entraînée  immédiatement  par  l'aimant. 

IV.  —  Extraction  des  corps  étrangers  de  la  sclérotique. 

Il  est  rare  de  rencontrer  des  paillettes  de  fer  implantées 
dans  la  sclérotique;  car  dans  la  grande  majorité  des  cas  la 
force  de  projection  de  ces  corps  est  tellement  grande  qu'ils 
traversent  la  coque  scléroticale  de  part  en  part,  et  se  per- 
dent soit  dans  le  corps  vitré  soit  dans  une  autre  membrane 
quelconque  interne  de  l'œil.  Néanmoins,  il  peut  arriver 
qu'un  petit  éclat  métallique  un  peu  angulaire  se  trouve 
arrêté  dans  sa  marche  par  le  tissu  dense  et  élastique  de  la 
sclérotique  et  qu'il  s'y  trouve  pour  ainsi  dire  emprisonné,  serré 
et  retenu  définitivement.  Si  la  blessure  scléroticale  occupe  la 
région  du  cercle  ciliaire,  le  corps  étranger  se  trouvant  ainsi 
implanté  profondément  dans  son  tissu,  atteindra  forcément 
le  cercle  ciliaire,  et  provoquera  des  accidents  des  plus  graves 
si  on  n'intervient  pas  à  temps. 

C'est  dans  ces  cas  surtout  que  l'application  de  l'aimant 


12  CORPS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 

rendra  un  très  grand  service,  et  ne  pourra  être  remplacé  par 
aucun  autre  instrument,  car  vu  l'importance  de  la  région 
blessée,  il  serait  dangereux  d'agrandir  beaucoup  la  plaie  et 
surtout  de  l'irriter  par  l'introduction  répétée  et  prolongée 
des  pinces,  quand  une  simple  application  d'un  fort  aimant 
suffit  pour  retirer  le  corps  étranger  de  la  plaie  et  sauver  ainsi 
l'œil  compromis. 

En  parcourant  tous  les  travaux  des  auteurs  sur  cette 
matière,  je  n'ai  trouvé  aucune  observation  relative  aux  corps 
étrangers  de  la  sclérotique. 

Le  fait  que  je  rapporte  ci-après,  me  paraît  présenter 
un  double  intérêt  ;  d'abord  par  sa  rareté  exceptionnelle,  et 
ensuite  il  montre  d'une  manière  des  plus  frappantes,  com- 
bien dans  ces  cas  une  application  méthodique  d'instru- 
ments aimantés  peut  être  efficace,  et  brillante  dans  les 
résultats  obtenus. 

Le  malade  que  nous  avons  soigné  pour  cet  accident  pré- 
sentait, comme  on  le  verra,  dans  la  région  ciliaire  une  plaie  peu 
étendue,  et  le  corps  étranger  se  distinguait  à  peine  au  milieu 
de  cette  dernière,  très  fortement  irritée,  douloureuse  et  for- 
tement injectée  tout  au  pourtour.  J'ai  dû  d'abord  inciser 
la  conjonctive  et  l'écarter  du  bord  de  la  plaie  scléroticale, 
pour  pouvoir  ensuite  appliquer  l'aimant.  L'opération,  du 
reste,  a  parfaitement  réussi,  le  corps  étranger  s'est  laissé 
facilement  détacher  de  la  plaie  scléroticale  et  retirer  au 
dehors,  ce  qui  a  été  suivi  d'une  prompte  et  radicale  guérison 
de  l'œil.  Ce  qui  est  digne  de  remarque,  c'est  que  la  paillette 
métallique  ne  produisait  aucune  saillie  à  la  surface  de  la 
plaie,  car  à  plusieurs  reprises  j'ai  passé  mon  doigt  d'a- 
bord et  ensuite  une  sonde  mousse  sans  avoir  pu  ressentir  soit 
une  rugosité  soit  une  autre  sensation  que  donne  le  corps 
étranger  métallique  au  contact  d'un  autre  métal. 

Voici  les  détails  de  cette  intéressanle  observation  qui  ont 
été  recueillis  par  mon  sous-chef  de  clinique,  M.  Despagnet. 


EXTRACTION  DES  CORPS  ÉTRANGERS  DE  LA  SCLÉROTIQUE.  13 


OBSERVATION 

Corps  étranger  de  la  sclérotique  de  Vœil  gauche. 
Extraction  avec  V aimant.  Guérison. 

M.  L...  Eugène,  trente  et  un  ans,  bijoutier,  rue  Ober- 
kamph,  62,  à  Paris,  en  frappant  avec  un  marteau,  voit  son 
outil  se  briser  et  il  en  reçoit  un  morceau  dans  l'œil  gauche, 
le  5  août  1885.  Le  corps  étranger  vint  s'implanter  dans 
l'angle  interne,  sur  la  sclérotique,  à  la  hauteur  du  méridien 
horizontal  de  l'œil  et  à  5  millimètres  de  la  cornée.  Il  s'en 
est  suivi  une  hémorragie  assez  intense  et  une  ecchymose 
sous-conjonctivale.  Le  lendemain  le  malade  se  présente  rue 
Dauphine.  Tout  son  œil  a  une  teinte  rouge  noir  foncé,  pro- 
duite par  l'épanchement  sanguin  sous-conjonctival.  Sur 
le  diamètre  horizontal  et  à  3  millimètres  en  dedans  de  la 
cornée,  on  voit  une  petite  plaie  triangulaire  béante.  Si  l'on 
introduit  un  stylet  on  ne  sent  pas  de  plan  résistant,  fourni  parle 
corps  étranger  qui  ne  forme  aucune  saillie  en  dehors  de  la 
sclérotique.  On  prescrit  l'atropine  en  instillation  et  la  pom- 
made de  vaseline.  Le  lendemain  on  se  dispose  à  l'extraction  du 
corps  étranger.  Préalablement,  avec  le  bistouri,  l'on  agrandit 
l'ouverture  de  la  plaie  conjonctivale,  et  on  écarte  de  chaque 
côté  les  bords,  de  façon  à  donner  un  passage  plus  facile  au 
morceau  d'acier.  Cela  fait,  on  introduit  la  pointe  de  l'aimant 
dans  la  plaie  scléroticale,  et  en  le  retirant  on  trouve  à  son 
extrémité  le  corps  étranger  de  forme  triangulaire  et  ayant 
un  millimètre  et  demi  de  long. 

Les  suites  ont  été  des  plus  simples.  On  continua  l'usage  de 
l'atropine  et  de  la  vaseline.  Trois  jours  après  la  plaie  était 
cicatrisée  par  première  intention,  et  l'ecchymose,  pour  dis- 
paraître totalement,  amis  environ  quinze  jours. 

L'œil  a  guéri  complètement,  en  recouvrant  la  netteté 
parfaite  de  l'acuité  visuelle. 

Ce  fait  me  paraît  être  des  plus  concluants  et  des  plus  dé- 
monstratifs de  l'utilité  d'instruments  aimantés  dans  la  ciii- 
rurgie  oculaire;  car  sans  l'aimant,  nous  aurions  eu  beaucoup 
de  peine  à  retrouver  le  corps  étranger.  Je  me  rappelle  même 
un  cas  analogue,  dans  lequel,  il  y  a  plus  de  dix  ans,  j'ai 
fait  la  dissection  de  la  plaie  scléroticale,  et  j'ai  cherché  avec 
des  pinces  à  retirer  le  corps  étranger,  mais  mes  tentatives 


14  CORPS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 

sont  restes  vaines  ;  le  corps  étranger  est  resté  dans  le  fond  de  la 
plaie.  L'œil  resta  enflammé  pendant  plusieurs  mois  ;  j'ai 
perdu  ensuite  de  vue  le  malade. 

Y.  —  Extraction  «1cm  paillettes  de  fer  da  cristallin. 

Les  accidents  de  cette  nature  sont  relativement  assez  fré- 
quents: un  éclat  de  fer  traverse  la  cornée,  quelquefois  la  cornée 
etl'iris,  et  se  fixe  dans  le  cristallin.  Il  en  résulte  une  cataracte 
traumatique  avec  le  corps  étranger  fixé  au  milieu  des  couches 
corticales.  Les  conséquences  de  pareilles  blessures  ne  sont 
pas  toujours  les  mêmes,  car  elles  dépendent  du  volume  du 
corps  étranger  et  de  l'étendue  de  la  plaie  capsulaire  qu'aura 
produit  le  corps  étranger  en  pénétrant  dans  le  cristallin. 

Il  arrive,  en  effet,  quelquefois,  que  la  paillette  métallique 
est  tellement  petite,  et  qu'elle  a  été  lancée  avec  une  telle  force 
de  projection,  que  c'est  à  peine  si  l'on  pourra  distinguer  le 
point  d'entrée  aussi  bien  du  côté  de  la  cornée  que  dans  la 
capsule.  Le  traumatisme  produit  dans  ces  conditions  n'aura 
pas  toujours  les  mêmes  suites  :  il  peut  arriver  que  la  plaie 
capsulaire  se  referme  très  rapidement  et  que  l'humeur 
aqueuse  ne  pénètre  pas  dans  les  couches  corticales  ;  d'où  il 
s'ensuivra,  que  la  masse  cristallinienne  conservera  la  trans- 
parence, malgré  la  présence  du  corps  étranger  qu'on  pourra 
distinguer  à  travers  le  cristallin  transparent. 

On  comprendra  parfaitement  que,  dans  ces  conditions,  la 
présence  du  corps  étranger  au  milieu  des  fibres  cristalli- 
niennes  n'est  nullement  dangereuse,  et  il  n'y  a  aucune  néces- 
sité de  chercher  à  l'extraire,  tant  que  le  cristallin  conserve 
sa  transparence. 

Le  fait  suivant  en  est  la  meilleure  preuve  : 

ORSERVATION 

Corps  étranger  fixé  clans  le  cristallin  avec  conservation  de  la 
transparence  de  ce  dernier. 

M.  Adolphe  C...,  âgé  de  dix-neuf  ans,  demeurant  à  Poissy, 
reçoit  un  morceau  de  fer  dans  l'œil  gauche,  détaché  d'un  clou, 


EXTRACTION  DES  PAILLETTES  DE  FER  DU  CRISTALLIN.  15 

qu'il  voulait  enfoncer  dans  le  mur,  c'est  à  peine  s'il  a  res- 
senti un  léger  picotement.  L'œil  resta  rouge  quelques  jours, 
et  au  moment  où  le  malade  vint  me  voir,  le  16  novembre  1875, 
j'ai  constaté  une  petite  plaie,  longue  de  trois  à  quatre  milli- 
mètres à  la  partie  interne  de  la  cornée  presque  cicatrisée,  et 
un  léger  trouble  de  la  capsule  cristallinienne.  Après  avoir 
dilaté  la  pupille,  j'ai  pu  distinguer  très  facilement  un  corps 
luisant  situé  à  la  partie  inféro-interne  du  cristallin.  Cette 
opacité  ne  s'est  point  étendue,  le  corps  étranger  resta  confiné 
dans  le  même  point  du  cristallin,  et  la  vue  revint  au  même 
pointqu'avant  l'accident,  cornmej'ai  pum'enassurer,  envoyant 
le  malade  le  13  décembre  suivant  et  le  27  janvier  1884.  Mais 
il  y  a  un  fait  qui  m'a  frappé  chez  ce  malade,  c'est  que  la 
teinte  luisante  du  corps  étranger  a  disparu,  et  à  mon  dernier 
examen  je  ne  voyais  plus  qu'une  tache  blanche  bien  circon- 
scrite qui  masquait  le  corps  étranger.  Le  reste  du  cristallin 
conservait  sa  transparence.  L'-œil,  au  dire  du  malade,  est 
devenu  depuis  l'accident  plus  myope  que  précédemment, 
mais  il  pouvait  lire  les  caractères  les  plus  fins. 

Des  faits  de  ce  genre  ne  sont  pas  fréquents,  et  pour  ma 
part,  je  dois  dire  que  je  ne  les  ai  observés  que  deux  fois. 
Habituellement,  au  contraire,  il  arrive  que  la  plaie  de  la 
capsule,  produite  par  la  pénétration  du  corps  métallique  dans 
le  cristallin  est  suivie  d'une  opacification  générale  de  cette 
dernière. 

Lorsque  ce  corps  étranger  se  laisse  apercevoir  à  travers 
les  couches  corticales  et  qu'il  se  trouve  placé  non  loin  de  la 
surface  antérieurie,  rien  n'est  plus  facile  alors  que  de  l'extraire 
par  le  procédé  d'extraction  linéaire.  On  fait,  en  effet,  une  inci- 
sion linéaire  dans  la  cornée,  et  avec  la  curette  en  acier 
aimantée,  on  entre  derrière  le  corps  étranger  à  travers  les 
couches  corticales  et  on  l'attire  au  dehors. 

Dans  le  dernier  congrès  d'ophtalmologistes  de  New-York, 
le  docteur  James  Minov 1  a  rapporté  un  cas  d'extraction  du 
corps  étranger  du  cristallin  à  l'aide  d'un  crochet  à  strabisme 
aimanté,  qu'il  avait  introduit  dans  l'œil. 

Si,  après  quelques  tentatives,  on  n'arrive  pas  à  attirer  le 

i.  James  Minov,  American  Ophtalmological  society,  July  1885  (Tlie  Médical 
Record). 


16  CORPS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 

corps  étranger  au  dehors,  ni  avec  la  curette  aimantée  ni  avec 
la  pince,  on  devra  alors  introduire  dans  le  cristallin  la  forte 
sonde  aimantée,  et  au  besoin,  une  sonde  communiquant  avec 
la  pile  électrique  et  on  parviendra  alors  à  attirer  le  morceau 
de  fer.  Quant  aux  autres  parties  du  cristallin,  on  les  retirera 
avec  la  curette,  en  introduisant  successivement  dans  la  pu- 
pille et  à  plusieurs  reprises  une  simple  curette  de  Daviel. 

Deux  fois  j'ai  eu  l'occasion  d'extraire  la  cataracte  avec  le 
corps  étranger,  en  me  servant  d'instruments  non  aimantés; 
les  détails  d'observation  me  manquent.  Dans  les  trois  autres 
cas  j'ai  pu  extraire  le  corps  étranger  en  me  servant  deux  fois 
de  la  curette  aimantée,  et  une  fois  de  la  pince  aimantée. 
Dans  tous  ces  cas  j'ai  dû  suivre  les  mêmes  préceptes  : 
aussitôt  l'incision  de  la  cornée  et  de  la  capsule  faite,  j'intro- 
duis soit  la  pince  soit  la  curette  à  travers  les  couches  corti- 
cales, directement  jusqu'au  corps  étranger,  et  je  le  retire  au 
dehors  sans  me  préoccuper  de  la  cataracte.  Ce  n'est  qu'après 
que  le  corps  étranger  se  trouve  enlevé  que  je  procède 
à  l'extraction  de  la  cataracte,  d'après  les  règles  de  l'extrac- 
tion de  la  cataracte  molle  ou  demi-molle  par  le  procédé 
linéaire. 

La  conduite  du  chirurgien  sera  toute  différente  s'il  s'agit 
d'une  cataracte  produite*  par  le  corps  étranger  métallique,  si 
ce  dernier  ayant  pénétré  dans  le  cristallin  a  provoqué  son 
opacification  et  si  l'on  ne  peut  pas  distinguer  la  position  qu'il 
occupe. 

Trois  conditions  peuvent  se  présenter  dans  ces  sortes  de 
blessures  :  ou  bien  le  corps  étranger  se  trouvera  enfoncé  dans 
les  couches  corticales  profondes,  ou  bien  il  a  traversé  de 
part  en  part  le  cristallin,  et  ira  tomber,  soit  dans  le  corps 
vitré,  soit  qu'il  se  fixe  dans  la  rétine  ou  la  choroïde.  On  s'as- 
surera de  la  présence  du  corps  étranger  dans  les  membranes 
profondes  de  l'œil,  par  la  diminution  de  la  densité  du  globe 
oculaire,  par  une  très  grande  injection scléroticale,  ainsi  que 
la  sensibilité  de  l'œil;  par  une  perle  d'une  partie  quelconque 
du  champ  visuel,  et  enfin  par  la  présence  d'une  tache  noire 
sur  une  partie  quelconque  du  fond  de  l'œil,  lorsque  le  cris- 


EXTRACTION  DES  PAILLETTES  DE  FER  DU  CRISTALLIN.  17 

tallin  aura  conservé  sa  transparence  et  qu'on  aura  pu  exami- 
ner l'intérieur  de  l'œil. 

C'est  ainsi  que  les  choses  se  sont  passées  dans  un  cas, 
déjà  ancien,  que  j'ai  opéré  et  qui  ne  manquera  de  présenter 
quelque  intérêt  non  pas  au  point  de  vue  de  l'extraction  avec 
l'aimant,  car  il  s'agissait  d'une  capsule  en  cuivre,  mais  rela- 
tivement à  la  localisation  des  corps  étrangers  qui  traversent 
le  cristallin  et  de  diagnostic  différentiel. 

Voici  ce  fait  : 

OBSERVATION 

Blessure  de  l'œil  avec  un  éclat  de  capsule,  lritis  et  iridocy- 
clite  persistante.  Présence  d'une  exsudation  dans  la  ma- 
cula indiquant  le  siège  du  corps  étranger.  Enucléation  de 
l'œil. 

M.  le  capitaine  de  vaisseau  M...,  âgé  de  quarante- 
trois  ans,  vint  me  consulter  en  4868  pour  une  iritis  très 
intense  de  l'œil  gauche,  dont  il  souffrait,  depuis  plus  de  huit 
mois.  Il  raconte  qu'ayant  été  invité,  pendant  son  séjour  dans 
une  ville  de  l'Amérique  du  Sud,  à  la  chasse  chez  un  de  ses 
amis,  il  s'y  rendit  avec  son  fusil  à  piston.  Subitement  en  tirant, 
un  coup,  il  sentit  une  douleur  vive  dans  l'œil  gauche,  et  s'était 
aperçu  qu'il  voyait  mal  de  cet  œil.  11  consulta  un  médecin  du 
pays,  qui  le  rassura,  disant  qu'il  n'y  avait  rien  dans  l'œil,  et 
qu'avec  quelques  fomentations  froides  tout  se  serait  calmé. 
Malheureusement,  l'œil  devint  de  plus  en  plus  injecté,  la  vue 
se  troubla  et  le  malade  commença  à  souffrir  de  la  photopho- 
bie, de  larmoiement  et  des  douleurs  péri-orbitaires.  11  revint 
en  Europe,  souffrant  beaucoup  à  bord  de  son  navire.  A  Liver- 
pool,  il  consulta  un  oculiste,  qui  lui  déclara  qu'il  s'agissait 
d'une  iritis  constitutionnelle  et  lui  prescrivit  l'atropine  et  les 
pilules  de  mercure.  Ne  voyant  pas  d'amélioration,  il  revint  à 
Paris  me  consulter. 

Apres  avoir  examiné  attentivement  l'œil  malade,  j'ai  décou- 
vert, non  sans  peine  une  tache  blanche  linéaire  de  deux  milli- 
mètres de  longueur,  au  bord  interne  de  la  cornée  qui 
correspondait,  évidemment  au  point  d'entrée  de  la  capsule. 
L'iris  était  enflammé  et  conservait  une  dilatation  moyenne. 
Sur  la.  partie  interne  de  la  capsule  on  apercevait  une  tache 
opaque  qui  s'étendait  sous  forme  d'une  ligne  dans  toute 
l'épaisseur  du  cristallin.  A  l'examen  ophtalmoscopique,  j'ai 
pu  reconnaître  très  facilement  une  exsudation  blanche, 

2 


IN 


CORPS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 


grande  comme  la  moitié  de  la  papille  dans  la  région  de  la 
macula;  la  papille  était  injeclée,  trouble,  nuageuse. 

La  perception  lumineuse  était  conservée,  le  malade  ne 
voyait  pas  en  face,  mais  sur  le  côté  son  champ  visuel  était 
encore  conservé,  et  il  pouvait  distinguer  les  mouvements  de 
la  main.  La  consistance  de  l'œil  était  un  peu  augmentée,  l'in- 
jection périkératique  assez  intense.  Le  malade  souffrait  beau- 
coup jour  et  nuit  des  douleurs  péri-orbitaires,  et  ne  man- 
geait presque  rien  depuis  plus  de  deux  mois. 

Evidemment,  il  s'agissait  pour  moi  d'un  corps  étranger 
fixé  dans  la  macula.  Le  professeur  Richet,  que  j'avais  appelé 
en  consultation,  confirma  mon  diagnostic.  J'ai  proposé  l'énu- 
cléation  du  globe  oculaire.  Le  malade  consentit  immédiate- 
ment à  cette  opération,  ce  qui  fut  fait  sans  aucune  compli- 
cation. La  cicalrisalion  de  la  plaie  s'est  faite  au  bout  de 
douze  jours.  La  santé  du  malade  s'est  rétablie  promptement 
et  il  jouit  aujourd'hui  d'une  excellente  santé.  P]n  disséquant 
l'œil  énucléé,  nous  avons  trouvé  le  morceau  de  capsule,  fixé 
dans  la  région  de  la  macula;  toutes  les  parties  voisines  de  la 
choroïde  et  de  la  rétine  étaient  couvertes  d'un  exsudât  épais, 
contenant  une  grande  quantité  de  globules  de  pus. 


VI.  —  Extraction  des  paillettes  de  fer  du  corps  vitré. 

L'humeur  vitrée  est  assez  fréquemment  le  siège  de  corps 
étrangers;  ce  sont  des  paillettes  métalliques  de  très  petite 
dimension,  des  éclats  de  capsule  et  le  plus  souvent  des  pail- 
lettes de  fer. 

Leur  principale  porte  d'entrée  est  la  cornée  :  de  là  ils  tra- 
versent le  cristallin,  soit  en  passant  parla  pupille,  soit  à 
travers  l'iris  lui-même.  Dans  des  cas  rares,  lorsqu'ilspénètrent 
près  de  la  grande  circonférence  de  l'iris  et  de  la  cornée,  ils 
peuvent  franchir  une  autre  voie  en  dehors  du  cristallin, juste 
au  voisinage  du  canal  de  Petit.  Mais  il  arrive  bien  souvent 
que  le  chemin  que  parcourent  ces  corps  étrangers  est  beau- 
coup plus  court,  ils  frappent  la  sclérotique,  la  déchirent, 
traversent  la  choroïde  et  la  rétine,  et  se  fixent  dans  une 
de  ces  deux  membranes,  ou  bien  restent  suspendus  au  milieu 
du  corps  vitré. 

11  arrive  habituellement  que  des  paillettes  d'une  très 


EXTRACTION  DES  PAILLETTES  DE  FER  DU  CORPS  VITRÉ.  19 

petite  dimension,  celles  qui  ont  épuisé  toute  leur  vitesse 
acquise,  s'arrêtent  dans  l'humeur  vitrée,  et  descendent  peu 
à  peu  dans  les  parties  déclives. 

Des  éclats  métalliques  d'une  grande  dimension,  ceux  sur- 
tout qui,  lancés  avec  une  très  grande  violence,  n'ont  pas 
épuisé  leur  force  de  propulsion,  en  traversant  la  sclérotique, 
pénètrent  dans  la  masse  du  corps  hyaloïdien,  et  vont  dans 
la  sclérotique  du  côté  opposé  pour  y  rester  fixés.  Il  est 
rare  qu'ils  traversent  de  part  en  part  la  sclérotique  en  avant 
et  en  arrière  du  globe  pour  se  fixer  dans  la  cavité  orbilaire. 
Les  auteurs  ont  signalé  des  faits  de  ce  genre,  mais  je  dois 
déclarer  que  je  ne  les  ai  jamais  vus. 

Lorsqu'ils  rebondissent  sur  la  coque  oculaire,  et  retombent 
dans  le  corps  vitré,  ils  peuvent  se  fixer  là  dans  un  point  dé- 
clive du  globe,  s'y  envelopper  dans  une  masse  sanguine  qui 
aura  été  épanchée  par  la  choroïde  blessée,  et  constituer  là 
un  exsudât  fixe  qui  ne  compromettra  en  rien  l'existence  de 
l'œil. 

Dans  d'autres  cas  moins  fréquents,  il  est  vrai,  ces  corps  de- 
viennent mobiles,  ils  scintillent  et  flottent  au  milieu  du  corps 
hyaloïdien  sous  forme  d'un  flocon,  que  l'on  aperçoit  facile- 
ment à  l'aide  de  l'ophtalmoscope.  Habituellement  ils  se  pré- 
sentent comme  des  corps  luisants  d'un  volume  beaucoup 
plus  grand  qu'ils  ne  sont  en  réalité  ce  qui  est  dû  à  la  réfrin- 
gence du  corps  vitré  lui-même  et  du  cristallin  à  travers  lequel 
on  les  examine. 

Rarement  ce  corps  étranger  est  isolé;  il  se  trouve  accom- 
pagné du  flocon  sanguin  et  fibrineux,  qu'on  peut  quelquefois 
suivre  depuis  la  plaie  d'entrée  jusqu'au  corps  étranger  lui- 
même  sous  forme  d'une  traînée  noire  ou  blanchâtre  qui  in- 
dique le  trajet  parcouru. 

On  reconnaît  facilement  sa  présence  dans  le  corps  vitré, 
lorsqu'il  est  seul  et  isolé,  car  il  a  l'apparence  d'un  corps 
luisant  d'abord,  et  ensuite,  au  bout  de  quelques  temps 
après  l'accident,  d'un  flocon  circonscrit,  à  contours  bien 
tranchés  et  de  dimensions  bien  peu  prononcées.  L'aspect 
luisant  de  ce  corps  visible  à  l'image  renversé,  ses  contours 


20  CORPS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 

franchement  accusés,  et  la  rapidité  relativement  très  grande 
de  déplacement  dans  l'humeur  vitré,  tous  ces  signes  suffi- 
sent amplement  pour  établir  un  diagnostic  exact  de  la  pré- 
sence de  ce  corps.  Il  faut  y  joindre  la  présence  dans  un  point 
quelconque  de  la  surface  choroïdienne  d'une  tache  plus  ou 
moins  large  d'atrophie  ou  déchirure  choroïdienne  avec 
plaques  exsudatives  et  pigmenlaires,  qui  correspondent 
généralement  au  point  d'entrée  du  corps  étranger. 

Des  paillettes  dé  fer  isolées,  qui  flottent  dans  l'intérieur 
de  l'œil,  peuvent  conserver  leur  position  pendant  de  longues 
années ,  sans  amener  d'accidents  inflammatoires  dans  le 
globe  oculaire.  Gela  se  comprend  très  facilement  par  la 
structure  elle-même  du  corps  vitré,  qui  n'a  ni  vaisseaux 
ni  nerfs,  et  qui  ne  peut  par  conséquent  pas  s'enflammer 
tant  que  celte  inflammation  ne  vient  pas  par  propagation  et 
par  voisinage  de  la  choroïde. 

Il  n'est  pas  rare,  en  effet,  de  rencontrer  des  cas,  dans  les- 
quels le  corps  étranger  métallique  se  conserve  au  milieu 
du  corps  vitré  pendant  des  années  sans  compromettre  ni  la 
vision  ni  la  nutrition  de  l'organe  visuel.  Pour  ma  part,  j'ai 
le  souvenir  de  deux  cas  de  ce  genre;  une  fois  il  s'agissait 
d'un  malade  de  la  clinique  de  Desmarre  père,  qui  conserva  un 
flocon  luisant  dans  le  corps  vitré  pendant  plusieurs  mois  sans 
qu'il  en  ait  approuvé  le  moindre  inconvénient.  Dans  un  autre 
cas,  le  malade  était  un  ancien  officier  retraité  et  qui  venait 
me  consulter  cinq  ou  six  ans  après  la  blessure  pour  un  éclat 
d'acier  qui  se  voyait  très  distinctement  flottant  dans  l'humeur 
vitré.  L'œil  n'avait  point  souffert  depuis  l'accident. 

Mon  éminent  confrère  et  ami,  le  Dr  Théophile  Anger,  m'a 
rapporté  dernièrement  l'histoire  d'un  cas  des  plus  intéres- 
sant, qu'il  avait  observé  sur  un  des  vieillards  de  Bicêtre. 
Cet  homme,  qui  était  soigné  pour  un  ramollissement  cérébral, 
portait  dans  l'intérieur  de  son  corps  vitré  un  flocon  métal- 
lique, bien  visible  à  l'ophlalmoseope,  depuis  plus  de  vingt 
ans.  Il  n'en  a  jamais  souffert.  Il  succomba  après  une  attaque 
cérébrale  et  à  l'autopsie  faite  avec  soin,  M.  Anger  a  retrouvé 
le  corps  étranger  métallique  dans  le  corps  vitré. 


EXTRACTION  DES  PAILLETTES  DE  FER  DU  CORPS  VITRÉ.  21 

Ce  dernier  fait  prouve  d'une  manière  très  concluante, 
que  la  présence  d'un  corps  métallique  quelconque  dans  l'hu- 
meur vitrée  n'est  pas  une  indication  absolue  pour  une  inter- 
vention chirurgicale,  et  que  du  moment  qu'il  se  trouve  sus- 
pendu dans  le  liquide,  il  peut  y  rester  indéfiniment  sans 
provoquer  une  inflammation  et  sans  compromettre  en  aucune 
façon  l'œil  blessé  et  encore  moins  son  congénère. 

Mais  il  n'en  est  pas  de  même  lorsque  des  flocons  plus  ou 
moins  nombreux  accompagnent  ce  corps  étranger,  surtout 
si  le  cristallin  lui-même  a  été  blessé  et  s'est  opacifié. 

On  trouvera  dans  ces  cas  des  renseignements  sur  la  pré- 
sence du  corps  étranger  dans  la  sensibilité  de  l'œil  au  toucher, 
dans  la  présence  d'une  plaie  pénétrante  dans  la  cornée  ou 
dans  la  sclérotique,  et  dans  les  accidents  inflammatoires  du 
côté  de  l'iris  et  de  la  choroïde. 

La  présence  d'un  corps  étranger  dans  l'intérieur  de  l'œil 
est  très  souvent  récélé  par  un  développement  d'une  irido- 
cyclite  avec  hypopyon  et  par  un  épanchement  plastique  fibri- 
neux  dans  le  corps  vitré,  que  l'on  reconnaît  à  l'œil  nu  et  à 
l'éclairage  latéral  par  un  reflet  jaunâtre  derrière  le  cristallin. 
Si  on  joint  à  tous  ces  symptômes  une  diminution  notable  de 
la  tension  de  l'œil,  pouvant  aller  jusqu'à  l'atrophie  du  globe 
oculaire,  on  aura  alors  un  tableau  très  complet  de  la  maladie. 

Il  est  certain,  qu'un  certain  nombre  de  ces  corps  étran- 
gers peuvent  s'enkyster  et  rester  dans  l'œil  sans  provoquer 
des  accidents;  mais  ces  cas  ne  doivent  être  considérés  que 
comme  des  faits  exceptionnels. 

En  règle  générale,  on  doit  considérer  la  présence  d'un 
corps  étranger  métallique  accompagné  des  flocons  dans  le 
corps  vitré  comme  un  danger,  plus  ou  moins  rapproché, 
pour  l'œil  blessé  aussi  bien  que  pour  son  congénère  et  il  faut 
chercher  à  l'extraire.  S'il  s'agit  d'un  morceau  de  cuivre,  l'in- 
tervention devient  difficile  car  il  ne  nous  reste  pas  d'autre 
alternative  que  d'ouvrir  la  sclérotique  et  d'aller  le  chercher 
à  l'aide  d'une  pince,  tout  à  fait  au  hasard. 

11  n'en  est  pas  de  même  si  le  corps  étranger  est  un  mor- 
ceau d'acier,  car  dans  ces  cas,  l'introduction  d'un  fort  aimant 


22  GOIÎPS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 

dans  la  cavilé  bulbaire  suffit  très  souvent  pour  l'attirer  vers 
la  plaie  et  l'extraire  au  dehors. 

L'extraction  des  paillettes  ne  fer  du  corps  vitré  à  l'aide 
d'un  aimant,  peut  se  faire  par  deux  voies  différentes,  soit  à 
travers  une  incision  cornéenne  après  une  extraction  du  cris- 
tallin soit  à  travers  une  incision  scléroticale. 

Il  est  très  rare  de  trouver  une  occasion  dans  laquelle  le 
cristallin  se  trouve  ou  résorbé  ou  opacifié  et  ramolli,  et  où 
nous  puissions  faire  d'un  seul  coup  les  deux  opérations  : 
d'abord  à  l'extraction  du  cristallin,  et  puis,  séance  tenante, 
l'extraction  à  travers  la  pupille  du  corps  étranger.  Plus  sou- 
vent, au  contraire,  nous  nous  trouvons  en  présence  d'un  cas, 
dans  lequel  une  paillette  de  fer  aura  pénétré  à  travers  la 
sclérotique  en  laissant  intact  le  cristallin. 

C'est  pourquoi  nous  sommes  beaucoup  plus  souvent  obligé 
de  tailler  une  plaie  plus  ou  moins  large  dans  la  sclérotique 
et  de  pénétrer  à  travers  cette  plaie  avec  un  aimant  puissant 
dans  l'intérieur  du  corps  vitré  et  le  promener  dans  tous  les 
sens  pour  l'atteindre.  Habituellement  si  l'aimant  est  assez 
puissant,  et  si  le  corps  étranger  est  libre  de  toute  attache,  il 
se  laisse  entraîner  par  l'aimant,  môme  s'il  est  enveloppé  dans 
des  exsudations. 

On  doit  procéder  à  l'extraction  du  corps  étranger  immédia- 
tement après  l'accident,  car  dans  ces  cas  il  est  encore  libre 
de  toute  adhérence,  l'inflammation  n'existe  point,  et  les 
suites,  par  conséquent,  de  l'opération  elle-même  sont  plus 
brillantes. 

Mais  il  arrive  assez  souvent  que  le  malade  ne  se  décide  pas 
immédiatement  à  l'opération,  surtout  si  on  le  prévient  que 
sa  suite  n'est  pas  toujours  exempte  de  danger,  et  il  préfère 
attendre.  Dans  d'autres  cas,  ne  souffrant  que  peu  après  la 
blessure,  il  ne  vient  pas  consulter,  qu'après  un  certain  laps 
de  temps  et  au  moment  où  l'inflammation  se  sera  déclarée.  Que 
ce  soit  pour  telle  raison  ou  pour  telle  autre,  toujours  est-il 
que  nous  avons  souvent  affaire  à  des  blessures  d'une  date 
ancienne,  datant  de  quelques  semaines  et  même  de  quelques 
mois,  et  alors  le  rôle  du  chirurgien  devient  bien  plus  diffi- 


EXTRACTION  DES  PAILLETTES  DE  FER  DU  GORFS  VITRÉ.  23 

cile  el  le  résultat  de  l'opération  tout  à  fait  problématique. 

Faut-il  chercher  à  retirer  le  corps  étranger  de  l'œil,  lorsque 
ce  dernier  se  trouve  enflammé,  et  quel  est  le  degré  d'inflam- 
mation compatible  avec  l'opération? 

Les  opinions  à  ce  sujet  sont  très  variées  si  on  juge  d'après 
les  différents  auteurs. 

Hirschberg1,  dans  son  travail,  divise  les  indications  de 
l'opération  en  trois  catégories  :  a)  primitive  lorsqu'on  la 
fait  immédiatement  après  l'accident,  dans  les  premières 
12-24  heures;  b)  secondaire  lorsqu'on  la  pratique  dans  la 
période  d'irritation  et  d'inflammation  qui  se  développe  dans 
l'œil  après  la  pénétration  du  corps  étranger,  inflammation 
allant  jusqu'à  l'infiltration  diffuse  du  pus  dans  le  corps  vitré, 
et  c)  tertiaire,  lorsque  les  premiers  accidents  inflammatoires 
se  seront  calmés  ou  dissipés  complètement,  et  au  bout  d'un 
temps  plus  ou  moins  long,  après  des  mois  ou  des  années 
même,  le  corps  étranger  en  se  déplaçant  aura  amené  des 
accidents  inflammatoires  tardifs.  Selon  lui,  l'opération 
d'extraction  à  l'aide  d'un  aimant  devra  être  pratiquée  dans 
toutes  ces  conditions,  quitte  plus  tard  à  enlever  l'œil,  si  ce 
dernier,  après  l'extraction  du  corps  étranger  s'est  atrophié 
ou  si  la  vue  ne  s'est  pas  rétablie. 

Il  rapporte  seize  observations  d'extraction  de  paillettes  de 
fer  avec  l'aimant  dans  la  période  tardive  secondaire  ou  ter- 
tiaire, el  sur  seize  cas,  quinze  fois  on  a  dû  enlever  l'œil  ou 
ne  conserver  à  la  suite  de  l'opération  qu'un  simple  moignon. 

Ces  observations  sont  les  unes  personnelles,  et  les  autres 
empruntées  à  différents  auteurs  et  si  on  les  analyse  attentive- 
ment, on  se  convaincra  facilement  qu'elles  ont  été  pratiquées 
aussi  régulièrement  que  possible.  Dufour,  Knapp  ont  fait  les 
tenlatives  d'extraction  des  paillettes  de  fer  dans  la  période 
d'iridocyclitc  avant  l'énucléation. 

On  doit  donc  se  demander  si  après  des  résultats  nuls, 
car  le  plus  souvent  on  a  dû  recourir  ensuite  à  une  énucléa- 
tion,  si  réellement,  dis-je,  il  y  a  quelque  avantagea  aller 


1.  Hirschberg,  loc.  cil.,  p.  34. 


24  CORPS  ÉTRANGERS  METALLIQUES  DE  L'ŒIL. 

fouiller  dans  un  œil  qu'on  peut  d'avance  considérer  comme 
perdu,  avec  des  instruments  aimantés  ou  non,  et  s'il  n'est 
pas  préférable  de  pratiquer  dès  le  début  une  énucléalion  du 
globe  oculaire.  Je  pense  que  l'extraction  d'une  paillette  de 
fer  avec  un  aimant  faite  dans  un  œil  atteint  d'une  irido- 
cyclite  avec  suppuralion  du  corps  vitré,  est  une  simple  opé- 
ration de  curiosité,,  visant  l'effet  de  nouveauté  et  qui  expose 
le  malade  à  des  souffrances  inutiles  et  prolongées  et  aux  deux 
opérations,  plus  graves  l'une  que  l'autre,  quand  une  simple 
énucléation  faite  à  temps,  aurait  pu  débarrasser  le  malade,  et 
du  premier  coup,  des  conséquences  fâcheuses  de  la  bles- 
sure. 

Selon  moi,  voici  la  conduite  que  l'on  devra  tenir  dans  un 
cas  de  blessure  de  l'œil  avec  un  morceau  d'acier  dans  le 
corps  vitré  : 

4°  Lorsque  le  corps  étranger  occupe  le  corps  vitré,  et  que 
l'accident  est  tout  récent,  il  ne  faut  pas  hésiter  à  inciser  la 
sclérotique  et  aller  le  chercher  à  l'aide  d'un  aimant. 

2"  Si  le  corps  étranger  se  trouve  dans  le  corps  vitré  depuis 
un  cerLain  temps,  quelques  jours,  quelques  semaines  et 
même  plus,  et  qu'il  provoque  des  accidents  inflammatoires 
du  côté  de  l'iris  et  de  la  choroïde,  mais  si  le  corps  vitré  ni 
l'humeur  aqueuse  ne  contiennent  pas  encore  du  pus, 
l'extraction  de  la  paillette  de  fer  avec  l'aimant,  devra  être 
tentée,  car  dans  ces  conditions  l'opération  a  quelques  chances 
de  succès. 

C'est  ainsi  que  Me.  Keown,  Jeaffreson  et  Hirschberg  ont 
obtenu  des  succès  tout  à  fait  satisfaisants  au  point  de  vue  du 
rétablissement  de  la  vision  toutes  les  fois  que  les  accidents 
étaient  récents  et  sans  suppuration.  M.  Frôhlich 1  a  publié 
un  cas  très  intéressant,  dans  lequel  la  vision  a  été  presque 
totalement  rétablie  après  l'extraction  de  la  paillette  avec 
l'aimant. 

Dufour2  a  fait  plusieurs  tentatives  d'extraction  de  mor- 

1.  FriJhlich,  Extraction  eines  Eisensplitlers  ans  den  Glaskôrper  mit  dem 
Elcctromannctcn;  fastvolle  Sohsch.  KUn.  Monatsbl.  /'.  Augenh.,  XXXIII, 
p.  350. 

2.  Dufour,  Revue  médicale  de  la  Suisse  romande,  juillet,  septembre  1885. 


EXTRACTION  DES  PAILLETTES  DE  FER  DU  CORPS  VITRÉ.  25 

ceaux  de  fera  l'aide  de  l'aimant,  et  dans  un  cas  il  a  parfaite- 
ment réussi.  Knapp3  a  communiqué  dans  le  dernier  Congrès 
d'ophtalmologistes  américains  les  résultats  de  sa  propre 
pratique.  Dans  trois  cas  la  tentative  d'extraction  du  corps 
étranger  avec  l'aimant  n'a  pas  réussi,  et  il  a  dû  faire  l'énu- 
cléation.  Dans  les  quatre  autres  cas  il  a  dû  réintroduire  l'ai- 
mant k  plusieurs  reprises,  et  l'opération  a  été  suivie  d'excel- 
lents résultats. 

Dans  deux  cas,  le  globe  de  l'œil  est  resté  un  peu  mou  et 
moins  dense  que  dans  l'état  normal  malgré  la  conservation 
de  la  perception  lumineuse  dans  tout  le  champ  périphérique. 

En  ce  qui  me  concerne,  j'ai  eu  un  heureux  résultat  dans 
un  cas,  tandis  que  dans  les  deux  autres  cas,  malgré  les  tenta- 
tives répétées  de  l'introduction  de  l'aimant  dans  le  corps 
vitré,  je  n'ai  pas  pu  avoir  le  corps  étranger  et  j'ai  dûénucléer 
l'œil,  ce  dont  j'avais  du  reste  prévenu  d'avance  le  malade. 

3°  Il  est,  selon  moi,  indispensable  de  procéder  de  la  ma- 
nière suivante  :  Si  le  corps  étranger  que  l'on  recherche  dans 
le  corps  vitré  à  l'aide  d'un  aimant,  ne  peut  être  retiré  au 
dehors,  et  lorsqu'on  a  introduit  à  plusieurs  reprises  l'aimant 
dans  l'œil  et  que  ces  tentatives  n'aboutissent  cà  aucun  résultat, 
il  faut  alors,  sans  hésiter,  énucléer  le  globe  de  l'œil  séance 
tenante  et  préserver  ainsi  l'autre  œil  des  accidents  sympa- 
thiques. 

Voici  mes  trois  observations  nouvelles  de  l'extraction  des 
corps  étrangers  du  corps  vitré  avec  l'aimant. 

OBSERVATION 

Blessure  de  l'œil  avec  un  éclat  de  fer.  Pénétration  du  corps 
étranger  dans  le  corps  vitré.  Son  extraction  à  laide  d'un 
aimant.  Guérison. 

M.  B...,  âgé  de  trente-sept  ans,  ouvrier  mécanicien,  de- 
meurant à  Grenelle  et  occupé  dans  l'usine  Cail,  reçoit  en 
burinant  un  éclat  de  fer  dans  l'œil.  Immédiatement  la  vue  se 


1.  Knapp,  American  Ophthalmol.  Society,  juilloH885,  p.  13. 


26  CORPS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 


troubla,  mais  il  n'y  faisait  pas  grande  attention,  et  se  contenta 
d'appliquer  un  bandage  et  une  compresse  d'eau  froide.  Ce 
n'est  que  le  neuvième  jour  qu'il  vint  me  voir  à  la  clinique,  le 
21  novembre  1882,  et  j'ai  pu  constater  une  plaie  transversale 
dans  la  sclérotique  gauche,  à  5  millimètres  du  bord  de  la 
cornée,  un  peu  en  dehors  et  en  bas  de  cette  membrane.  L'œil 
est  mou,  très  fortement  injecté,  l'iris  est  verdâtre  et  des 
exsudations  pupillaires  masquent  le  fond  de  l'œil.  Néanmoins, 
par  un  éclairage  latéral,  on  peut  apercevoir  facilement  un 
reflet  rougeâtre  derrière  le  cristallin,  qui  n'est  autre  qu'un 
épanchementsanguin  devenant  purulent  dans  ie  corps  vitré.  La 
perception  lumineuse  existe  quoique  faible.  En  présence  de  ces 
accidents,  je  n'hésite  pas  de  proposer  l'énucléalion,  ce  à  quoi 
le  malade  consent  immédiatement.  Mais  une  fois  le  malade  en- 
dormi à  l'aide  du  chloroforme,  nous  avons  cru  utile  d'essayer 
d'extraire  le  corps  métallique  à  l'aide  d'un  aimant.  Après  avoir 
fait  une  incision  d'avant  en  arrière  sur  la  sclérotique,  dans  la 
région  équatoriale  entre  le  muscle  droit  externe  et  supérieur, 
nous  avons  introduit  un  fort  aimant  dans  l'œil;  ce  n'est  que 
dans  une  quatrième  exploration  que  nous  avons  eu  la  satis- 
faction de  retirer  un  morceau  d'acier,  long  de  4  millimètres  et 
2  millimètres  et  demi  d'épaisseur.  Par  la  même  plaie,  il  s'est 
écoulé  une  certaine  quantité  du  corps  vitré  que  nous  avons  pu, 
en  outre,  retirer  un  gros  paquet  floconné  de  sang  coagulé.  La 
plaie  a  été  réunie  avec  un  fil  de  soie,  et  l'œil  avait  guéri,  au 
point  que  quatre  mois  plus  tard  j'ai  eu  l'occasion  del'exami  er 
et  de  constater  que  malgré  l'opacité  partielle  du  cristalin  et 
la  présence  d'une  masse  opaque  en  bas  du  fond  de  l'œil,  le 
malade  voyait  à  compter  facilement  les  doigts,  et  pouvait 
presque  se  conduire  seul  de  cet  œil. 


ORSERVATION 

Blessure  de  Vœil  avec  pénétration  d'une  paillette  de  fer  dans 
le  corps  vitré.  Tentatives  d'extraction.  Énucléation. 

M.  T...,  âgé  de  quarante-trois  ans,  demeurant  à  Paris,  re- 
çoit un  éclat  de  fer  dans  l'œil.  Il  en  résulte  une  porte  de  la 
vue  presque  instantanée  avec  une  diminution  notable  de  la 
densité  du  globe.  En  septembre  '1883  je  lais  une  tentative 
répétée  d'extraction  du  corps  étranger,  mais  sans  résultat. 
En  présence  de  cet  insuccès,  je  fais  une  énucléation  du  globe, 
et  je  trouve,  en  présence  de  MM.  Parisotti,  Parent  et  Despa- 


EXTRACTION  DES  PAILLETTES  DE  FER  DU  CORPS  VITRÉ.  27 

gnet  un  morceau  d'acier  assez  volumineux  dans  la  région  du 
cercle  ciliaire  :  le  corps  vitré  était  tout  entier,  ainsi  qu'une 
partie  de  la  choroïde,  en  suppuration. 

OBSERVATION 

Blessure  de  l'œil  avec  un  morceau  de  fer.  Tentatives 
d'extraction.  Enucléation. 

Le  nommé  R.  R...,  âgé  de  vingt-huit  ans,  reçoit  d'un  de 
ses  camarades  qui  travaillait  avec  lui  dans  un  atelier  de  ser- 
rurerie, un  éclat  de  fonte,  qui  au  premier  abord  ne  trouble  que 
très  peu  la  vue.  Le  malade  vint  nous  consulter  dès  le  lende- 
main et  nous  constatons  un  trouble  profond  du  corps  vitré 
et  un  commencement  d'iritis.  J'ai  prescrit  un  traitement  an- 
tiphlogistique,  car  l'idée  de  l'opération  est  rejetée  par  le  ma- 
lade. Le  malade  ne  revint  plus  me  voir  qu'au  bout  de  dix- 
huit  jours,  et  j'ai  reconnu  alors  une  iridocyclite.  Le  malade 
accepte  l'opération  de  l'extraction  du  corps  étranger  avec 
l'aimant.  Mais  après  des  tentatives  restées  infructueuses, 
j'ai  pratiqué  séance  tenante  l'énucléation.  Le  corps  étranger 
se  trouve  fixé  dans  le  cercle  ciliaire  au  milieu  d'une 
masse  exsudative  remplie  de  pus,  et  qui  était  attachée  à  la 
choroïde. 

Dans  ces  trois  cas,  de  même  que  dans  tous  les  autres  rap- 
portés par  les  auteurs  où  les  tentatives  d'extraction  à  l'aide  de 
l'aimant  n'ont  donné  que  des  résultats  négatifs,  on  pourrait 
croire  qu'on  avait  affaire  à  des  corps  étrangers  situés  dans 
l'humeur  vitrée,  mais  en  réalité  ces  paillettes  métalliques 
étaient  fixées  dans  la  choroïde,  d'où  la  suppuration  de  cette 
dernière  membrane  et  du  corps  vitré,  et  l'impossibilité  de 
l'extraction  du  corps  métallique  emprisonné  dans  la  mem- 
brane vasculaire,  comme  l'examen  de  deux  yeux  énucléés 
me  l'a  démontré. 

VII.  —  Extraction  des  morceaux  «le  fer  <Ie  la  rétine. 

Nous  avons  exprimé,  dans  les  pages  qui  précédent,  noire 
opinion  sur  la  manière  dont  se  comportent  le  plus  habituelle- 
ment les  corps  étrangers  dans  le  corps  vitré.  Selon  le  volume 


28  CORrS  ÉTRANCERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 

plus  ou  moins  grand,  et  selon  la  force  de  projection,  ils  res- 
tent suspendus  dans  le  corps  vitré,  ou  bien  ils  se  fixent  quelque 
part  dans  la  rétine  ou  la  choroïde. 

Il  est  excessivement  rare  de  voir  une  paillette  de  1er  se 
fixer  dans  la  rétine  elle-même,  et  dans  telles  conditions  que 
l'ophlalmoscope  puisse  dévoiler  son  existence  et  son  siège.  Le 
plus  habituellement  ces  corps  traversent  en  même  temps  la 
réline  et  la  choroïde  et  occasionnent  immédiatement  des 
accidents  inflammatoires  tellement  intenses,  qu'il  s'ensuit 
très  rapidement  un  trouble  du  corps  vitré,  une  iritis  avec  des 
exsudations  pupillaires,  ne  permettant  plus  d'éclairer  le  fond 
de  l'œil.  Souvent  on  voit  survenir  une  suppuration  de  la 
choroïde,  qui  exige  une  énucléation  du  globe  oculaire, 
car  toute  autre  intervention  chirurgicale  devient  impos- 
sible. 

Lorsque  le  corps  étranger  pénètre  dans  l'œil  à  travers  la 
cornée  et  le  cristallin,  ce  dernier  devient  trouble,  et  la  cata- 
racte qui  en  résulte  rend  toute  exploration  impossible. 

Mais  si  dans  la  grande  majorité  des  cas  les  choses  se  pas- 
sent ainsi,  il  n'en  est  pas  moins  vrai  que,  dans  certaines  cir- 
constances heureuses,  la  paillette  de  fer,  après  avoir  pénétré 
avec  une  très  grande  force  de  projection  à  travers  la  cornés 
et  le  cristallin  laisse  à  peine  dans  ce  dernier  une  trace  per- 
ceptible de  son  passage,  ce  qui  fait  que  la  transparence  du 
cristallin  se  conserve  pendant  un  lemps  plus  ou  moins  long 
et  permet  l'exploration  du  fond  de  l'œil.  Si,  à  l'aide  de  l'oph- 
talmoscope,  on  découvre  la  présence  du  corps  étranger  sur  la 
rétine,  on  sera  alors  autorisé  à  pratiquer  l'extraction  à  l'aide 
d'un  aimant. 

11  faut  avouer  que  les  cas  de  ce  genre  ne  se  rencontrent  pas 
souvent,  et  on  ne  trouve  jusqu'à  présent  dans  la  science  que 
deux  faits  analogues,  celui  que  j'ai  opéré  avec  un  succès  com- 
plet, et  dont  j'ai  communiqué  l'observation  à  la  Société  de 
chirurgie  en  4881,  et  un  autre  fait,  très  intéressant  aussi,  qui 
a  été  observé  et  décrit  par  M.  Hirschberg.  Nous  croyons  utile 
de  reproduire  ici  les  deux  observations,  car  l'une  et  l'autre 
présentent  un  intérêt  pratique  de  la  plus  haute  importance, 


EXTRACTION  DES  PAILLETTES  DE  FER  DE  LA  RÉTINE.  29 

tant  au  point  de  vue  du  diagnostic  que  relativement  à  l'inter- 
vention chirurgicale. 
Voici  le  résumé  de  l'observation  de  M.  Hirschberg  \ 

ODSERVATION 

Tentative  d'extraction  tertiaire  d'un  morceau  d'acier  volu- 
mineux, fixé  dans  la  rétine  et  les  membranes  sous-jacentes, 
au  voisinage  du  nerf  optique.  Enucléalion. 

Le  nommé  Oscar  Pommerenii  âgé  de  vingt-cinq  ans,  est 
blessé  àl'œil  gauche  par  un  éclat  de  fer  le  23  décembre  4881. 
On  constate  une  plaie  de  trois  millimètres  au  bord  inférieur 
delà  cornée,  ayant  atteint  la  sclérotique  et  la  région  ciliaire. 
Le  corps  vitré  est  rempli  de  sang  ;  le  cristallin  est  transparent. 

En  examinant  avec  l'ophtalmoscope  on  constate  au-dessus 
du  diamètre  horizontal,  sur  la  rétine,  trois  petites  taches 
noires,  rondes,  superposées,  et  avec  des  reflets  luisants  au 
milieu.  Le  24-  décembre  on  aperçoit  la  papille  optique  à 
moitié  recouverte  de  sang,  et  quelques  taches  hémorragiques 
disséminées  jusqu'à  la  macula  sur  le  fond  grisâtre  de  la  rétine 
infiltrée  par  une  suffusion  séreuse.  Quelques  taches,  à  côté, 
indiquent  la  déchirure  de  la  choroïde. 

Le  30  décembre  le  malade  reconnaît  la  montre,  l'œil  est 
un  peu  douloureux. 

Le  malade  revient  après  une  longue  absence,  le  49  novembre 
4882,  et  on  constate  qu'il  distingue  les  caractères  n°  50  de 
Snellen  à  quinze  pas,  et  que  le  champ  visuel  est  de  tous  les 
côtés  rétréci.  Le  globe  de  l'œil  n'est  point  irrité,  le  cristallin 
est  transparent,  la  papille  optique  ainsi  que  les  parties  voi- 
sines il^la  rétine  sont  troubles,  sans  être  gonflés.  Tout  près 
de  la  papille  on  aperçoit  des  exsudats  un  peu  saillants,  et  au 
milieu  de  l'une  de  ces  taches  exsudatives  M.  Hirschberg  a  pu 
reconnaître  le  corps  étranger. 

Le  16  juin  1883  le  malade  revint  à  la  consultation  avec  un 
œil  excessivement  enflammé;  uneirido-cyclites'élait  déclarée. 
On  pratique  alors  une  incision  dans  la  sclérotique  mais  après 
des  tentatives  répétées  et  infructueuse,  d'extraction  du  corps 
étranger  avec  l'aimant,  puis  avec  une  pince  et  une  curette, 
on  a  dû  faire  l'énucléation  du  globe  oculaire. 


1.  Hirschberg,  Der  Eleldromagnel  inder  Auyenheilkunde,  p.  79. 


30  CORPS   ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL 

Voici  maintenant  un  autre  fait  de  l'extraction,  à  l'aide  d'un 
aimant,  d'un  corps  étranger  métallique,  fixé  dans  la  rétine, 
et  que  j'ai  retiré  avec  un  plein  succès  en  1881,  et  dont  j'ai 
communiqué  l'observation  à  la  Société  de  chirurgie.  Cette 
communication  a  été  examinée  par  une  commission  dont 
M.  Paul  Berger  était  le  rapporteur. 

Voici  les  détails  de  cette  observation,  tels  que  nous  les  avons 
rédigés  pour  la  Société  de]chirurgie.  Nous  les  ferons  suivre  du 
rapport  très  intéressant  et  très  érudit  de  M.  Berger  ainsi  que 
de  la  discussion  qui  eut  lieu  à  ce  sujet  dans  la  Société  de  chi- 
rurgie. Nous  compléterons  ensuite  l'observation  par  des  dé- 
tails, postérieurs  à  la  communication,  car  chez  notre  malade 
il  s'était  formé,  quelques  mois  après  l'extraction  du  corps 
étranger,  une  cataracte  que  nous  avons  opérée  ensuite  avec  un 
plein  succès.  Ce  complément  d'observation  sera  une  réponse 
aux  objections  qui  ont  été  faites  dans  la  discussion  de  la 
Société  de  chirurgie  par  MM.  Desprès  et  Giraud-Teulon. 

OBSERVATION 

Blessure  de  la  cornée,  de  Viris  et  du  cristallin  par  un  éclat  de 
fer  qui  s'est  logé  dans  la  rétine.  Extraction  au  moyen 
d'une  sonde  aimantée.  Guérison. 

M.  L...,  âgé  de  quarante  et  un  ans,  ajusteur  mécanicien, 
demeurant  à  la  Villette,  avait  reçu  en  burinant,  un  éclat  de 
fer  dans  l'œil  gauche;  sa  vue  se  troubla  immédiatement  et  il 
voyait  tomber  comme  des  gouttes  d'huile  devant  l'œil. 

Le  21  mars,  il  est  venu  nous  voir  à  la  clinique  et  nous  avons 
pu  constater  une  plaie  au  bord  iféiïeur  de  l'iris.  A  l'examen 
ophtalmoscopiquc,  on  pouvait  découvrir  une  bande  opaque 
dans  la  partie  inférieure  du  cristalin,  occupant  presque 
toutes  les  couches;  les  deux  tiers  supérieurs  du  cristallin 
étaient  libres,  transparents,  de  sorte  qu'il  était  facile  de  re- 
connaître à  l'image  renversée,  un  corps  étranger  noir,  placé 
au  bord  d'un  vaisseau,  et  qui  était  entouré  d'une  exsudation 
blanchâtre l. 

1.  La  figure  n°  2  de  la  pl.  n°  XVI  do  mon  Atlas  ophtalmoscopique  représente 
et  corps  étranger  de  la  rétine,  tel  qu'il  a  été  vu  par  moi  et  MM.  Yvcrt.  Parent 
et  Despagnct. 


EXTRACTION  DES  MORCEAUX  DE  FER  DE  LA  RÉTINE.  31 


Cet  examen  a  été  fait  à  plusieurs  reprises  par  moi,  ainsi 
que  par  MM.  Parent,  Yvert,  Chevalier  et  Despagnet.  Nous 
avons  prescrit  l'instillation  du  collyre  à  l'atropine  et  l'appli- 
cation de  cinq  sangsues  à  la  tempe.  La  nuit  suivante,  le  ma- 
lade avait  beaucoup  souffert,  l'œil  droit  était  devenu  très 
rouge,  surtout  dans  la  partie  équatoriale.  Nous  avons  pris  la 
décision,  sur  les  conseils  de  M.  Yvert,  de  pratiquer  l'extraction 
du  corps  étranger  à  l'aide  d'une  sonde  aimantée  qui  a  été 
construite  à  cet  effet  par  M.  Collin. 

Le  23  mars,  nous  avons  procédé  à  cette  opération.  Le  ma- 
lade ayant  été  couché  sur  le  lit  d'opérations,  nous  avons 
écarté  les  paupières  avec  le  blépharostat.  Après  avoir  saisi 
l'œil  avec  une  pince  et  l'avoir  attiré  très  fortement  dans  l'angle 
interne,  j'ai  marqué  approximativement  le  point  que  devait 
occuper  le  corps  étranger,  à  peu  près  à  2  centimètres  du 
bord  de  la  cornée,  et  dans  l'espace  situé  entre  les  muscles 
droit  externe  et  le  droit  supérieur.  Avec  le  couteau  de  Graefe, 
j'ai  fait  une  incision  de  k  à  5  millimètres,  d'avant  en  arrière, 
parallèlement  aux  muscles  droits  de  l'œil.  La  plaie  est  devenue 
immédiatement  béante,  et  le  corps  vitré  commençait  à  sortir 
au  dehors  ainsi  qu'une  certaine  quanLité  de  sang  choroïdien. 
J'ai  introduit  la  sonde  aimantée  dans  le  corps  vitré  et  je 
l'ai  promenée  autour  de  la  plaie  contre  la  rétine,  mais  le 
corps  étranger  ne  sortait  pas.  Ma  première  tentative  ayant 
échoué,  j'ai  engagé  M.  Yvert  à  renouveler  les  mêmes  essais; 
le  résultat  était  encore  négatif.  Croyant  alors  que  le  corps 
étranger  était  trop  fortement  fixé  à  la  rétine,  j'ai  introduit 
une  petite  pince  irienne  dans  la  plaie  et  je  l'ai  promenée  en 
appuyant  doucement  sur  les  parties  de  la  rétine  voisines  de 
la  plaie,  puis  j'ai  réintroduit  encore  une  fois  la  sonde  aiman- 
tée dans  la  plaie;  cette  fois-Là,  j'ai  eu  la  satisfaction  de  retirer 
la  paillette  de  fer  adhérente  au  bout  de  la  sonde.  Ce  corps, 
complètement  lisse  à  la  surface,  mesurait  à  peine  2  milli- 
mètres de  diamètre.  Immédiatement  après  l'extraction,  j'ai 
réuni  les  deux  bords  de  la  plaie  avec  un  point  de  suture  et 
j'ai  appliqué  un  bandage  compressif. 

Pendant  les  premières  douze  heures,  le  malade  a  beaucoup 
souffert,  mais  la  nuit  a  été  calme.  Le  lendemain  la  plaie  était 
très  injectée,  la  pupille  dilatée  par  l'atropine,  l'œil  rouge 
et  endolori.  Dès  le  quatrième  jour,  les  douleurs  cessèrent 
complètement;  le  sixième  jour,  la  suture  sclérolicale  est 
tombée  toute  seule,  et  à  partir  de  ce  moment  la  rougeur  du 
globe  oculaire  a  commencé  à  diminuer  rapidement. 

En  examinant  le  fond  de  l'œil  le  neuvième  jour,  nous 


32  *  CORrS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 

avons  pu  constater  avec  les  docteurs  Yvert  et  Parent,  qu'il 
exsitait  un  large  épanchement  sanguin  dans  le  corps  vitré, 
situé  au  voisinage  de  la  rétine,  et  très  probablement  à  l'en- 
droit de  la  plaie. 

9  avril.  —  L'épanchement  a  diminué  beaucoup,  la  papille 
paraît  plus  claire,  l'opacité  du  cristallin  n'a  point  augmenté, 
le  malade  peut  lire  les  caractères  n°  12,  ce  qu'il  ne  pouvait 
faire  avant  l'opération.  Toute  trace  d'inflammation  a  dis- 
paru, et  son  œil  peut  être  considéré  comme  guéri.  Son 
champ  visuel  reste  libre,  excepté  dans  une  portion  assez 
limitée  en  dedans  et  en  bas  où  il  existe  un  large  scotome. 

Voici  maintenant  le  rapport  détaillé  de  M.  Paul  Berger,  lu 
à  la  Société  de  chirurgie  : 

Vous  avez  pu  constater  sur  le  blessé  les  traces  de  l'incision 
scléroticale  pratiquée  par  M.  Galezowski.  Celui-ci  vous  a  fait 
voir  également  le  petit  éclat  d'acier  dont  il  avait  pratiqué 
l'extraction,  et  l'aimant  élégamment  construit  par  M.  Collin, 
au  moyen  duquel  il  avait  pu  l'obtenir  :  nous  ne  pouvons 
donc  que  féliciter  le  présentateur  du  succès  opératoire  qu'il 
vient  de  remporter.  Mais  la  restauration  de  la  vision  qu'il  a 
obtenue  chez  son  blessé  se  maintiendra-t-elle? 

Ce  cas  est  le  premier  où  l'on  dut  faire  usage  en  France,  à 
notre  connaissance  du  moins,  d'un  aimant  pour  cette  ma- 
nœuvre, l'une  des  plus  délicates  de  la  chirurgie  oculaire,  et 
cette  pauvreté  de  documents  tirés  de  notre  littérature,  nous 
a  forcé  à  chercher  ailleurs  des  faits  qui  nous  permettent  d'ap- 
précier l'extraction  des  corps  étrangers  perdus  dans  le  corps 
vitré  au  double  point  de  vue  des  résultats  définitifs  que  l'on 
peut  attendre  de  cette  opération  et  des  procédés  qui  ont  été 
mis  en  usage  pour  atteindre  ce  but. 

A  part  la  thèse  de  Ballias  (Les  corps  étrangers  du  corps 
vitré,  Th.  de  Paris,  1865)  où  sont  mentionnées  quelques- 
unes  des  tentatives  faites  jusqu'alors  pour  extraire  les  corps 
étrangers  du  corps  vitré,  l'on  ne  trouve  que  peu  de  détails 
sur  ce  point  dans  les  livres  classiques,  et  il  faut  arriver  à 
l'ouvrage  récent  dé  M.  Yvert  (Traité  pratique  et  clinique  des 
blessures  du  globe  de  Vœil,  Paris,  1880),  pour  voir  ce  sujet 
traité  avec  quelque  développement.  Signalons  pourtant  Pin- 


IBRARY)  n; 

EXTRACTION  DES  CORPS  ÉTRANGERS  DU  CORPS  VlTftB^*3Rirî 

dicalion  très  nettement  posée  par  notre  collègue,  M. 
Teulon  (art.  Corps  vitré,  in D ici.  encyclop.des  se.  méd.,  Paris, 
1878),  de  la  recherche  et  de  l'extraction  des  corps  étrangers 
tombés  dans  le  corps  vitré,  indication  déterminée  bien  plus 
par  la  nécessité  de  soustraire  l'œil  sain  aux  dangers  de 
l'ophtalmie  sympathique  que  par  l'espoir  de  conserver  à  la 
vision  un  organe  plus  ou  moins  utile. 

A  l'étranger  cependant,  des  tentatives  d'extraction  nom- 
breuses ont  été  pratiquées;  leurs  résultats  signalés  par  leurs 
auteurs  sont  devenus  le  point  de  départ  de  travaux  d'en- 
semble importants  et  de  perfectionnements  notables  dans  le 
manuel  opératoire;  c'est  donc  principalement  en  puisant  aux 
sources  étrangères  que  nous  avons  pu  réunir  trente  obser- 
vations d'extraction  de  corps  étrangers  du  corps  vitré.  Celles- 
ci  constituent,  avec  le  fait  de  M.  Galezowski,  la  presque  tota- 
lité des  cas  jusqu'à  présent  publiés  et  connus. 

Le  premier  exemple  d'extraction  d'un  corps  étranger  du 
corps  vitré  est  dû  à  de  Graefe  (Grœfé's  Archiv,  vol.  III,  2); 
mais  dans  ce  fait,  ainsi  que  dans  deux  autres  publiés  par 
V.  Jseger  (Wiener  Krankenhausbericht,  4857  et  1858),  le 
corps  vulnérant  était  resté  fixé  par  son  extrémité  dans  la 
sclérotique  d'où  il  put  être  retiré  avec  des  pinces.  La  simpli- 
cité du  diagnostic  et  du  mode  opératoire,  dans  les  cas  pré-, 
cités,  nous  engage  à  ne  pas  les  faire  entrer  dans  une  statis- 
tique où  nous  ne  tiendrons  compte  que  des  corps  étrangers 
perdus  en  quelque  sorte  dans  le  corps  vitré. 

C'est  donc  à  Critchett  (The  Lancet,  1854-,  I,  p.  358),  qu'à 
été  due  la  première  extraction  connue  d'un  corps  étranger 
perdu  dans  le  corps  vitré,  extraction,  d'ailleurs,  suivie  d'un 
assez  beau  succès.  Puis  Desmarres  (Annales  d'oculistique, 
t.  XXIII,  p.  16)  retira  un  fragment  de  capsule  du  corps 
vitré,  mais  l'œil,  débarrassé  du  corps  étranger  s'atrophia 
lentement  et  fut  perdu  pour  la  vision.  Enfin  Dixon  (Ophtal- 
mie Hospilal  Reports,  l,  p.  280)  répéta,  avec  plus  de  succès 
que  Desmarres,  l'opération  exécutée  d'abord  par  Critchett. 
Le  premier  il  eut  l'idée  de  recourir  à  l'application  d'un 
aimant  au  voisinage  de  l'œil,  non  pour  faciliter  l'extraction 

3 


3-4  CORPS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 

du  corps  d'acier  contenu  dans  le  corps  vitré,  il  est  vrai,  mais 
pour  assurer  le  diagnostic. 

Viennent  ensuite  les  importantes  contributions  à  l'histoire 
des  corps  étrangers  du  corps  vitré  dues  àR.  Berlin  (de  Stutt- 
gart). Cet  auteur  s'attacha  principalement  à  étudier  la  marche 
que  le  corps  suivait  dans  l'intérieur  de  l'œil,  et  à  démontrer 
qu'il  se  réfléchissait  presque  toujours  sur  le  pôle  postérieur, 
pour  venir  se  fixer  dans  les  parties  situées  en  avant  de  son 
point  de  contact  avec  ce  dernier.  Ses  tentatives  d'extraction, 
au  nombre  de  sept,  relatées  dans  quatre  mémoires  successifs 
(Zehend.  klin.  Monalsbl.,  IV,  1876,  p.  81  :  un  cas  ;  —  Ueber 
clen  Gang  der  in  tien  Glaskôperraum  eingedrungenen  (Yém- 
en Kôrper,  in  Grœfé's  Arch.,  XIII,  2,  p.  275,  4807  :  un  cas. 
—  Beobachtungen  ûber  fremcle  Kôrper  m  den  Glaskorper 
raum,  inlbid.,  XIV,  2, p.  275  :  trois  cas.  —  Archives  of  Oph. 
talmology  de  Knapp  et  Moos,  vol.  I,  p.  30,  deux  cas),  furent 
suivies  de  résultats  défavorables  et  presque  toujours  de  la 
perte  de  l'œil. 

Revenant  en  Angleterre,  nous  y  trouvons  deux  extirpations 
pratiquées  la  première  par  Sp.  Watson  (The  Lancet,\8T%,  II, 
p.  598),  la  seconde  par  J.-E.  Jeafferson  (On  foreign  bodiesin 
the  eije,  mMed.  Times  and  Gazette,  28  mars  187-4,  p.  342, 
obs.  VI);  puis  un  très  beau  succès  de  Schœler  (Opht.  Inst. 
Rep.,  1874)  qui  n'est  connu  que  par  la  très  courte  mention 
qui  en  est  faite  dans  le  compte  rendu  annuel  de  Virchow  et 
Ilirsch  sur  les  progrès  de  la  médecine.  Peu  de  temps  après, 
en  Amérique  G. -T.  Stevens  (d'Albany),  parvint  à  retirer  un 
corps  étranger  du  corps  vitré  en  le  guidant  sur  une  fine 
aiguille  introduite  jusqu'à  lui,  par  ponction,  au  travers  de  la 
sclérotique  (Trans.  ofthe  Amer.  Opht.  Society,  1875, p.  308). 

Ce  fut  encore  à  un  Anglais  qu'il  appartînt  d'avoir  le  pre- 
mier mis  à  contribution  l'attraction  magnétique  pour  aller  à 
la  recherche  du  corps  étranger  métallique  et  l'extraire.  Dans 
trois  cas,  William  A  M'Keown,  chirurgien  de  l'hôpital  ophtal- 
mologique de  Delfast,  put  retirer  au  moyen  de  l'aimant  des 
parcelles  de  fer  ou  d'acier  perdu  dans  le  corps  vitré(0n/7ie  use 
ofthe  magnct  in  the  diagnosis  of  the  présence  of  steel  or  iron 


EXTRACTION  DES  CORrS  ÉTRANGERS  DU  CORT-S  VITRÉ.  35 

in  theeye,  and  in  Ihc  extraction  oftïiereof,  wilh  ilùnstrative 
cases,  in  The  Dublin  Journal  of  Médical  Science,  vol.  LXII, 
1875,  p.  201  ;  obs.  1,  2  et  3).  Cetle  ingénieuse  innovation  dont 
Dixon  avait  été  le  précurseur  en  quelque  sorte,  lui  qui  s'était 
servi  des  mouvements  imprimés  au  corps  étranger  par  l'ai- 
mant pour  en  déterminer  la  situation  précise,  fut  adoptée, 
depuis  lors,  par  presque  tous  les  opérateurs,  et  principale- 
ment par  Knapp  et  par  Hirschberg  :  c'est  elle  qu'a  mis  à 
profit,  en  dernier  lieu,  M.  Galezowski. 

Knapp,  néanmoins  ne  l'utilisa  pas  tout  d'abord.  Dans  un 
premier  mémoire,  le  plus  complet  qui  ait  été  écrit  sur  ce 
point,  et  où  sont  relatées  presque  toutes  les  observations  que 
nous  venons  de  passer  en  revue,  il  cite  trois  faits  qui  lui  sont 
personnels  :  dans  deux  d'entre  eux  il  s'agissait  de  fragments 
■de  capsule,  et  la  nature  du  corps  étranger  ne  se  prêtait  pas  à 
l'application  de  l'aimant;  dans  le  troisième,  c'était  un  frag- 
ment de  fer  qu'il  retira  au  moyen  de  pinces  introduites  par 
une  incision  delà  sclérotique  (The  removal  of  foreign  bodies 
from  the  interior  of  the  eye,  in  Arch.  of  Ophtalmology  de 
Knapp  etMoos,  1878,  p.  330),  Mais  déjà  en  4879  Hirschberg 
avait  suivi  l'exemple  de  M'Keown  dans  un  des  deux  cas  dont 
son  premier  travail  sur  ce  point  renferme  l'histoire  (Glas- 
kôrper  Opérationen,  in  Grœfës  Arch. ,  XXII,  3,  p.  146)  .  A  l'ai- 
mant il  avait  même  substitué  l'action  de  l'électro-aimant 
que  nous  verrons  plus  fréquemment  employé  que  le  premier 
dans  la  suite.  Deux  extractions  suivies  de  deux  insuccès  com- 
plets terminés  par  l'énucléation  de  l'œil  l'avaient  àcette  époque 
fort  découragé,  et  la  relation  des  faits  qui  lui  étaient  per- 
sonnels était  bien  faite,  suivant  son  expression,  pour  calmer 
«le  débordement  d'enthousiasme  avec  lequel  on  baptise  du 
nom  d'opération  pratiquée  sur  le  corps  vitre,  les  extractions 
de  fragments  métalliques  simplementimplantésdansla  sclé- 
rotique et  n'ayant  déterminé  aucune  issue  du  corps  vitré  ». 

Aux  extractions  pratiquées  sans  l'intervention  de  l'aimant, 
il  faut  encore. ajouter  les  observations  de  J.-S.  Prout  (Re- 
moval of  a  pièce  of  a  sleel  from  the  vilreous  eye  bail  and  good 
préservation  of  lightperception,  in  Archiv.  of  Ophtalmology 


36  CORPS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  l'(EIL. 

de  Knapp  et  Hirschberg,  juin  1880,  p.  197)  el  de  G. -S.  Bull 
(On  the  removal  of  foreign  bodies  from  llie  eye,  with  foor  cases 
in  Ibid,,  1880,  p.  79). 

Cependant  dans  un  nouveau  mémoire  (Two  cases  of  re- 
moval of  fragments  ofiron  from  the  vitreous,  in  the  one  with 
a  scierai  flap-section,  in  the  olher  with  a  magnet;  remarks, 
in  iW.,  juin  1880,  p.  207), Knapp  rapportait  bientôtdeux  cas 
nouveaux  où  il  s'était  servi  d'électro-aimant,  une  fois  avec 
succès,  infructueusement  dans  l'autre  cas.  La  môme  année, 
G.  Frânkel  (de  Chemnitz),  s'était,  lui  aussi,  servi  avecbeaucoup 
de  succès  d'un  aimant  simple  dans  le  double  but  de  déplacer 
d'abord,  puis  d'extraire  le  fragment  de  fer  perdu  dans  le  corps 
vitré  (Entfemung  eines  Eisensplitlers  aus  dem  Glaskôrper 
miltelst Scleralschnitt und Magnet,  iaCentrablatt  fur  Augen- 
heilkunde,  18  février  1881).  Enfin  dans  une  communication 
faite  au  neuvième  congrès  des  chirurgiens  allemands,  Hirsch- 
berg, rapportant.deux  faits  personnels  nouveaux  où  l'électro- 
aimant  lui  avait  permis  de  retirer  des  fragments  d'acier  du 
corps  vitré,  revint  sur  ce  que  sa  première  appréciation  pou- 
vait avoir  de  trop  sévère  (Ueber  Entfemung  von  Eisen-splil- 
tern  aus  dem  Augeninnern  mit  Hùlfe  des  Elektromagneten. 
Bericht  ùber  die  Verhandlungen  der  deutschen  Gesellschaft 
fur  Chirurgie,  Xe  Congress,  Centrabl.f.  Chirurg.,  1881,  n°20). 

Telles  sont  les  observations  d'extraction  de  corps  étranger 
du  corps  vitré  que  nous  avons  pu  réunir.  Il  faut  y  joindre  la 
mention  d'une  opération  de  cette  nature  pratiquée  par 
Hansen,  mentionnée  dansle  Canstatfs  Jahresbericht,  relatée 
de  seconde  main,  par  Knapp  et  qui  est  la  seule  avec  celle  de 
Schceler  à  laquelle,  faute  d'indication  bibliographique  précise, 
nous  n'ayons  pu  directement  recourir. 

II.  U extraction  des  corps  étrangers  du  corps  vitré,  envi- 
sagée au  point  de  vue  de  ses  résultats  définitifs  el  durclablis- 
semenl  delà  vision.  —  «  Un  des  plus  beaux  succès  de  la  chi- 
rurgie moderne,  dit  M.  Galezowski,  dans  sa  communication, 
est  de  sauver  l'organe  en  faisant  l'extraction  au  moyen  d'un 
aimant,  du  corps  étranger  qui  a  pénétré  dans  le  corps 
vitré,  si  ce  corpsétranger  est  un  fragment  de  1er  ou  d'acier.  » 


EXTRACTION  DES  CORPS  ÉTRANGERS  DU  CORrS  VITRÉ.  37 

Nous  sommes  pleinement  de  son  avis,  mais  il  s'en  faut  de 
beaucoup  que  la  conservation  ou  la  restauration  des  fonc- 
tions visuelles  soit  toujours  la  conséquence  de  l' extraction 
du  corps  étranger,  même  lorsque  celle-ci  a  été  faite  avec 
succès  ;  c'est  ce  que  prouve  l'examen  des  trente  et  une  obser- 
vations que  nous  avons  pu  réunir. 

Deux  fois  seulement  nous  trouvons  noté  le  rétablissement 
complet  de  la  vision  (le  cas  de  Schœler  et  un  cas  de  Hirsch- 
berg). 

Le  résultat  paraît  néanmoins  avoir  été  bon  encore  dans 
quatre  observations  (celle  de  Dixon,  de  Galezowski,  une  de 
Knapp  et  une  de  M'Keown).  Dans  le  cas  de  M.  Galezowski, 
le  blessé  pouvait,  au  bout  de  dix-huit  jours,  lire  du  caractère 
n°  12  ;  toute  trace  d'inflammation  avait  disparu,  et  le  champ 
visuel  restait  libre,  sauf  dans  une  partie  assez  limitée  en 
dedans  et  en  bas  où  existait  un  large  scotome.  Le  malade  de 
M'Keown  pouvait,  à  un  pied  de  distance,  lire  le  n°  2  de 
l'échelle  de  Snellen,  au  bout  de  six  mois.  Celui  de  Knapp 
avait,  au  bout  d'un  an,  une  acuité  visuelle  égale  à  2/3.  Enfin 
dans  le  cas  de  Dixon,  le  bon  résultat  est  simplement  affirmé 
par  ce  terme  laconique  :  «  good  recovery.  »  Comme  nous 
verrons  dans  une  autre  observation  anglaise,  celle  de  Prout, 
en  tête  de  laquelle  nous  lisons  :  «  Préservation  oflhe  eyeball 
and  good  perception  of  light,  »  que  labonne  perception  de  la 
lumière  se  bornait  à  une  perception  quantitative  et  que  la 
tension  oculaire  était  diminuée,  nous  sommes  forcés  de  nous 
tenir  en  garde  contre  des  succès  annoncés  d'une  façon  aussi 
sommaire.  Nous  sommes  aussi  contraints  de  faire  quelques 
réserves  sur  le  cas  de  M.  Galezowski,  ainsi  que  nous  le 
dirons  dans  la  suite  :  classons  néanmoins  les  résultats  de  ces 
deux  opérations  parmi  les  succès  thérapeutiques. 

Le  rétablissement  de  la  vision  fut  médiocre  dans  quatre 
cas,  ceux  de  Critchett,  de  Fr.ïnkel,  de  Bull  et  dans  une 
observation  de  Knapp.  Le  malade  de  Critchett,  qui  fut  perdu 
de  vue  au  bout  de  dix  semaines,  avait  recouvré  une  vision 
moyennement  bonne,  suivant  l'observation.  Dans  le  cas  de 
Bull,  au  bout  de  quelques  jours,  l'acuité  visuelle  était  de  1/3; 


38  CORrS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 

il  en  était  de  même  après  quarante-sept  jours  chez  l'opéré  de 
de  Frànkèl;  eufin  Knapp,  parlant  d'après  de  simples  souve- 
nirs, rapporte  qu'un  jeuneenfant,  de  l'œil  duquel  il  avait  re- 
tiré un  éclat  de  capsule,  et  qu'il  put  suivre  pendant  quelques 
années,  avait  conservé  une  vision  modérément  bonne,  sans 
phénomènes  sympaliques  du  côté  opposé. 

La  restauration  des  fonctions  est  notée  comme  tout  à  fait 
insuffisante  dans  quatre  autres  observations.  Dans  l'une,  due  à 
Knapp,  quatre  semaines  après  l'opération,  le  malade  ne  pou- 
vait que  compter  les  doigts,  tandis  qu'après  la  blessure  il 
pouvait  lire  le  n°  2  1/2  de  Snellen  et  il  s'était  produit  une 
opacificalion  diffuse  du  corps  vitré.  Chez  un  opéré  de  Berlin, 
il  n'existait  que  la  perception  quantitative  de  la  lumière  au 
bout  de  plusieurs  mois.  Celui  de  Jeafferson  présentait  une 
acuité  de  1/10;  celui  de  Prout,  chez  lequel  cet  auteur  aurait 
observé  «  good  perception  of  light  »,  ainsi  que  nous  l'avons 
dit,  il  n'y  avait,  au  bout  de  quatre  ans,  que  des  perceptions 
quantitatives  de  lumière  et  la  tension  oculaire  était  abaissée. 

Dans  un  cas,  l'opération  dut  rester  inachevée  et  l'on  dut 
procéder  à  l'énucléation  immédiate  (R.  Berlin)  ;  pour  deux 
autres  (l'un  dû  au  même  auteur  et  l'autre  à  Hansen),  nous 
n'avons  aucun  renseignement  sur  le  résultat  fonctionnel. 
Dans  les  treize  derniers,  la  vision  fut  absolument  et  irrémé- 
diablement détruite.  Elle  est  simplement  notée  comme 
perdue  dans  une  observation  de  R.  Berlin,  dans  une  de 
Knapp,  dans  une  de  M'Keown,  dans  celle  de  Stevens  et  de 
Sp.  Watson.  L'atrophie  complète  de  l'œil  est  expressément 
indiquée  dans  trois  faits  de  Berlin  et  dans  celui  de  Des- 
marres. Trois  fois  les  douleurs,  les  phénomènesirritatifsetles 
menaces  d'ophtalmie  symphatique  motivèrent  l'énucléation 
de  l'œil  débarrassé  de  son  corps  étranger  (une  observation  de 
M'Keown  et  deux  de  Ilirschbcrg),  et  deux  fois  les  mêmes  acci- 
dents durent  être  combattus  par  l'énervalion  de  l'œil  (neuro- 
tomie  oplico-ciliaire).chcz  des  opérés  de  R.Berlin  (de  Stutt- 
gart) et  de  Ilirschbcrg. 

Ainsi  la  statistique  de  trente  et  une  extirpations  de  corps 
étrangers  du  corps  vitré  nous  donne,  à  côté  de  deux  succès- 


EXTRACTION  DES  CORPS  ÉTRANGERS  DU  CORI'S  VITRÉ.  39 

complets,  incontestables,  constatés  au  bout  de  longs  mois, 
quatre  succès  encore  assez  beaux,  dont  deux  malheureuse- 
ment peuvent  laisser  quelques  doutes;  quatre  cas  où  le  résul- 
tat fut  passable;  quatre  autres  où  il  fut  manifestement  insuf- 
fisant, et  treize  enfin  où  l'ablation  du  corps  étranger,  non 
seulement  ne  sauva  pas  l'œil  blessé,  mais  ne  put  même  tou- 
jours (dans  cinq  cas)  mettre  l'autre  œil  à  l'abri  des  dangers 
de  l'ophtalmie  sympathique. 

Il  peut  être  utile  de  rechercher  les  causes  de  l'insuccès  et  le 
mode  suivant  lequel  l'œil  s'est  perdu  dans  ces  cas  malheu- 
reux. 

Dans  quelques  cas  rares,  comme  dans  un  fait  publié  par 
R.  Berlin,  la  gravité  du  même  traumatisme  oculaire  ne  pouvait 
laisser  aucun  espoir  de  conserver  au  blessé  un  œil  utile  :  il 
s'agissait,  dans  ce  cas,  d'une  balle  de  petit  calibre  qui  avait 
lacéré  la  cornée  et  l'iris;  l'œil  était  mou  et  revenu  sur  lui- 
même  avant  la  tentative  d'extraction. 

La  nature  du  corps  étranger  ne  paraît  pas  avoir  eu  une 
grande  influence  sur  le  résultat  final. Le  plus  souvent  il  s'agis- 
sait soit  de  paillettes  d'acier  ou  de  fer  détachées  d'un  mar- 
teau ou  d'un  ciseau,  soit  d'un  éclat  de  capsule;  leur  dimen- 
sions variaient  de  un  à  six  millimètres,  leur  poids  de  quelques 
milligrammes  à  quatre  centigrammes.  Or,  nous  trouvons  que 
le  corps  le  plus  volumineux  qui  ait  été  extrait  du  corps  vitré 
(Frànkel),  a  laissé  un  résultat  fonctionnel  assez  bon,  et  que 
fragments  d'acier  ou  débris  de  capsules  se  partagent  à  peu 
près  également  les  succès  et  les  insuccès. 

La  voie  suivie  par  le  corps  étranger,  pour  pénétrer  dans  le 
corps  vitré  n'a  pas  l'importance  que  l'on  pourrait  lui  attri- 
buer au  point  de  vue  du  succès  ou  de  l'insuccès  fonctionnel 
de  l'opération.  Tantôt  en  effet  le  corps  étranger  traverse  la 
cornée  et  l'iris  ('19  cas)  et  alors  assez  souvent  le  crisLallin  est 
opacifié  en  totalité  (3  cas)  ou  en  partie  (5  cas)  ;  tanLôt  l'agent 
vulnérant  atteint  la  slcérolique  (8  cas)  et  a  respecté  les  parties 
antérieures  de  l'appareil  dioptrique.  L'examen  des  cas  nous 
montre  le  rétablissement  complet  de  la  vision  pouvant  s'effec- 
tuer même  alors  que  le  cristallin  complètement  opaque  avait 


40  CORPS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 

dû  être  extrait  (cas  de  Schœler)  :  dans  cette  observation, 
comme  dans  celle  de  Crilchett,  le  diagnostic  et  l'ablation  du 
corps  ne  furent  possibles  qu'après  l'extraction  de  la  cataracte 
traumatique.  L'on  a  encore,  comme  dans  le  fait  de  Prout 
fait  suivre  l'issue  du  corps  étranger  de  l'extraction  par  la 
curette  des  portions  opacifiées  du  cristallin  partiellement, 
cataraclé.  Il  est  néanmoins  légitime  d'admeLtre  que  la  bles- 
sure de  la  cornée,  de  l'iris  et  du  cristallin  constituent  des 
complications  anatomiques  qui  assombrissent  le  pronostic 
fonctionnel,  mais  cette  opinion  se  fonde  sur  des  considéra- 
tions à  priori  plutôt  que  sur  l'examen  des  faits  connus. 

Il  en  est  de  même  des  lésions  que  le  choc  du  corps  étranger 
a  pu  produire  sur  les  membranes  du  fond  de  l'œil;  en  ce 
point  l'on  observe  souvent  un  décollement  de  la  réline  qui  se 
traduit  après  la  guérison  par  un  scotome  persistant  ou  une 
limitation  du  champ  visuel  (Hirschberg,  Berlin,  Galezowski); 
ce  décollement  de  la  rétine  lui-même  a  pu  guérir  ainsi  que 
l'observation  de  Frânkel  le  prouve. 

Avant  de  passer  à  l'examen  des  conditions  qui  ont  sur  le 
succès  définitif  l'influence  la  plus  marquée,  mentionnons 
brièvement  ce  qui  a  tuait  à  l'âge  des  malades  et  à  la  durée  du 
séjour  du  corps  étranger  dans  le  corps  vitré. 

Quoique  les  meilleurs  résultats  aient  été  observés  sur  de 
jeunes  sujets  (douze  à  seize  ans)  l'on  ne  saurait  en  con- 
clure que  les  blessures  du  corps  vitré  augmentent  de  gravité 
avec  l'âge.  Un  fort  petit  nombre  de  blessés,  dont  l'âge  est  men- 
tionné dans  notre  stastistique,  avaient  dépassé  l'adolescence, 
et,  de  ceux-ci,  les  deux  plus  âgés,  ceux  de  Bull  (cinquante-trois 
ans)  et  de  Galezowski  (quarante  et  un  ans)  ont  fourni  des  suc- 
cès relatifs. 

Quant  à  la  durée  du  séjour  du  corps  étranger,  elle  fut 
unefoisde  neufmois  (Hirschberg),  uneautre  fois  de  sept  mois 
(Knapp);  dans  les  deux  cas  les  yeux  furent  perdus.  Mais  si,  le 
plus  souvent,  l'extirpation  suivie  du  succès  fut  pratiquée  dans 
les  vingt-quatre  ou  les  quarante-huit  heures  qui  suivirent  l'ac- 
tion de  la  cause  vulnérante,  nous  devons  cependant  compter 
deux  opérations  relativement  heureuses  pratiquées  au  vingt- 


EXTRACTION  DES  CORPS  ÉTRANGERS  DU  CORrS  VITRÉ.  41 

cinquième  jour  (Friinkel)  et  au  trente-huitième  jour  (Bull) 
aprèsla  blessure. 

Les  circonstances  qui  ont  sur  l'issue  finale  l'influence  la 
mieux  marquée  sont  les  phénomènes  inflammatoires  qui  se 
développent  dans  l'œil  et  spécialement  dans  l'appareil  irido- 
choroïdien  soit  avant,  soit  après  l'intervention  chirurgicale. 

La  pénétration  du  corps  étranger  dans  le  corps  vitré 
provoque  parfois  une  réaction  des  plus  modérées,  mais  le 
plus  souvent  dès  le  lendemain  se  développe  une  inflmmation 
conjonctivale;  puis  on  voit  se  développer  les  phéno- 
mènes del'iritis  aiguë  qu'accompagne  quelquefois  la  produc- 
tion d'un  hypopyon  (M'Keown,  Bull,  Hirschberg)  le  corps 
vitré  lui-même  se  trouble  et  dans  les  tentatives  d'extraction 
on  le  voit  coloré  en  jaune  par  le  pus  (Hirschberg).  Avec  ou 
sans  ces  phénomènes  d'inflammation  diffuse  se  produit  une 
inflammation  circonscrite  autour  du  corps  étranger  qui  tend 
à  l'enkyster  dans  des  adhérences  pseudo-membraneuses  qui  se 
développent  autour  de  lui,  ainsi  que  Desmarres  l'a  observé  le 
premier.  Quand  cette  inflammation  est  circonscrite  et  qu'elle 
aboutit  à  la  fixation  du  corps  étranger,  elle  est  la  cause  d'une 
difficulté  nouvelle  dans  l'opération  tentée  pour  l'extraire 
(Knapp,  Galezowski).  Mais  l'inflammation  diffuse  est  autre- 
ment danger  euse.  Dans  les  observations  où  elle  s'est  produite, 
l'œil  a  été  perdu  malgré  l'extirpation  pratiquée,  et  l'on  ne 
peut  faire  d'exception  que  pour  le  cas  (Critchett,  M'Keown, 
Hirschberg,  Galezowski)  où  l'ablation  de  corps  étranger  a  été 
faite  très  peu  d'heures  après  son  développement.  L'hypopyon 
doitparticulièrementêtre  considérécommeun  pronostic  grave 
et  l'on  doit  compter,  parmi  les  cas  exceptionnels,  celui  de  Bull 
ou  unepaillette  d'acier  put  être  retirée  après  trente-huit  jours 
de  séjour  dans  l'œil,  alors  qu'il  s'était  produit  de  l'iritis  avec 
hypoypon,  sans  que  l'organe  fût  perdu.  Il  est  vrai  que  laplaie 
scléroticale  était  restée  béante  jusqu'au  quarante-huitième 
jour,  peut-être  la  diminution  de  la  pression  oculaire  résul- 
tant de  ce  fait  pourrait-elle  expliquer  une  terminaison  aussi  peu 
en  rapport  avec  la  gravité  des  premiers  phénomènes.  Dans  les 
six  cas  les  plus  favorables,  l'inflammation  consécutive  ou  ne 


42  CORrS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 

s'était  pas  produite  (Schœlcr,  Hir.schb.erg,  Dixon,  Knapp)  ou 
était  modérée  (M'Kcown,  Galezowski). 

Somme  toute,  la  perte  de  l'œil,  ou  tout  au  moins  de  la 
vision,  est  le  résultatde  troubles  inflammatoires  qui  se  déve- 
loppent ou  se  continuent  après  l'extraction.  Non  que  le  plus 
souvent  les  manœuvres  d'extraction  puissent  être  incriminées  : 
l'irritation  qu'elles  ont  déterminée  se  calme  le  plus  souvent 
le  quatrième  jour  (Critchett,  R.  Berlin,  Knapp,  Galezowski) 
ou  manquent  (Desmarres,  Dixon,  Berlin,  Knapp)  :  quand  des 
phénomènes  inflammatoires  aigus  délerminentla  suppuration 
de  l'œil,  c'est  qu'il  y  avait  déjà  avantmenacedepanophtalmie; 
dans  une  observation  deM'Keown  il  y  avait  une  iridoeyelite 
aiguë  avec  hypopyon  avant  l'extraction  du  corps  étranger. 
Ces  cas  du  resLe  sont  rares  et  il  y  n'y  a  que  deux  observations  : 
une  de  Hirschberg,  et  une  de  M'Keown  où  la  fonte  purulente 
de  l'œil  ait  été  notée.  Parfois  au  contraire  l'opération  n'est 
suivie  d'aucune  aggravation  de  l'état  inflammatoire  et  néan- 
moins l'œil  se  perd.  Ce  fut  le  cas  dans  les  onze  autres  faits 
qui  se  terminèrent  parla  perte  de  l'œil. 

Celle-ci  peut  être  la  conséquence  d'une  iridoeyelite  à 
marche  lente,  qui  succède  aux  premiers  phénomènes  inflam- 
matoires. 

C'est  cette  complication  qui  a  nécessité  l'énucléation  de 
l'œil  ou  son  énervation  dans  les  cas  où  cette  opération  a  été 
pratiquée.  Mais  dans  d'autres  observations,  l'atrophie  gra- 
duelle du  globe  oculaire  ou  l'opacification  lente  du  corps 
vitré  (Desmarres)  sont  accusées  sans  qu'il  ait  eu  la  moindre 
réaction  à  la  suite  de  l'opération  (Berlin).  Un  espace  de  trois 
semaines  à  deux  mois  et  demi  a  suffi  le  plus  souvent  pour 
voir  se  confirmer  cette  terminaison  fatale,  dans  les  cas  où  la 
simplicité  des  phénomènes  qui  avaient  suivi  de  près  l'opéra- 
tion faisaient  augurer  le  plus  heureux  succès. 

Ces  considérations  sur  les  résultats  définitifs  que  donne, 
au  point  de  vue  delà  conservation  de  la  vision,  l'extraction 
des  corps  étrangers  perdu  dans  le  corps  vitré,  nous  font  voir  que 
cette  opération,  dont  on  ne  saurait  nier  le  magnifique  succès 
dans  des  cas  malheureusement  trop  rares,  cslforl  infidèle;  que 


EXTRACTION  DES  CORPS  ÉTRANGERS  DU  CORrS  VITRÉ.  43 

dans  l'immense  majorité  des  cas,  si  l'on  atteint  le  but  opéra- 
toire que  l'on  se  propose,  l'extraction  du  corps  étranger,  le 
but  thérapeutique,  la  conservation  de  la  visionnait  défaut  ou 
n'est  que  fort  incomplètement  rempli.  Nous  voyons  que 
l'issue  du  corps  étranger  non  seulement  ne  met  pas  le  globe 
oculaire  à  l'abri  de  l'atrophie  qui  s'en  est  emparée  presque 
dans  la  moitié  des  cas,  mais  que  les  menaces  persistantes 
d'ophtalmie  sympathique  contraignent  parfois  le  chirurgien 
à  recourir  à  l'énuclation  de  l'œil  ou  à  la  névrotomie;  enfin, 
que  dans  les  cas  les  plus  favorables  eux-mêmes,  il  faut  at- 
tendre des  mois  avant  de  se  prononcersur  la  validité  du  résultat 
acquis,  l'expérience  ayant  démontré  que  si  la  restauration  de 
la  vision  devient  dans  quelques  cas  rares  plus  complète  avec 
le  temps,  il  est  beaucoup  plus  fréquent  de  voir  l'iridocyclite- 
consécutive  et  la  phtisie  oculaire  détruire  les  résultats  d'une 
opération  conduite  avec  un  apparent  succès.  Nous  regrettons, 
par  conséquent,  d'avpir  à  formuler  une  réserve  sur  l'obser- 
vation communiquée  par  M.  Galezovvski,  dont  le  malade, 
opéré  depuis  dix-huit  jours  seulement  lorsqu'il  fut  présenté, 
n'était  point  encore  à  l'abri  des  complications  redoutables. 

Peut-on  espérer  que  les  récents  perfectionnements  du  ma- 
nuel opératoire  appelleront  sur  cette  opération,  dans  l'avenir, 
un  jugement  plus  favorable?  C'est  ce  que  nous  allons  recher- 
cher en  examinant  le  procédé,  d'invention  récente,  auquel 
M.  Galezowski  a  eu  recours  et  auquel  il  a  dû  son  succès. 

II f.  —  L'extraction  des  corps  étrangers  perdus  dans  le 
corps  vitré  envisagée  au  point  de  vue  du  manuel  opératoire  et 
spécialement  de  V emploi  des  aimants  clans  cette  opération. 

Ce  n'est  que  dans  un  très  petit  nombre  de  cas  que  le  pro- 
cédé par  lequel  le  corps  étranger  fut  extrait  s'est  imposé  à 
l'opérateur  presque  à  son  insu.  Ce  fut  ainsi  que  Berlin,  en 
procédant  à  l'énucléation  de  l'œil  blessé,  découvrit  la  pointe 
du  corps  étranger  qui  avait  traversé  la  sclérotique  vers  le  pôle 
postérieur  de  l'œil  et  qu'il  en  pratiqua  l'extraction.  Ce  même 
chirurgien,  incisant,  dans  un  autre  cas,  un  gonflement  in- 
flammatoire qui  soulevait  la  conjonctive  dans  la  région  équa- 
toriale  de  l'œil,  y  découvrit  un  fragment  de  capsule  qui  après 


44  CORPS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  l'(EIL. 

avoir  pénétré  à  travers  la  cornée,  l'iris,  le  cristallin  et  le  corps 
vitré,  était  ressorti  de  l'œil  en  traversant  la  sclérotique,  mais 
avait  été  arrêté  par  le  tendon  du  muscle  droit  supérieur  de 
l'œil.  Spencer  Wylson,  en  pratiquant  une  iridectomie  anti- 
phlogistique  sur  un  malade  qui  avait  reçu  un  grain  de  plomb 
dans  l'œil,  retira  l'agent  vulnérant  qui,  après  s'être  infléchi, 
sur  le  pôle  postérieur  de  l'œil  était  venu  s'amorlir,  puis  s'en- 
kyster contre  l'iris. 

Dans  quelques  autres  observations,  où  le  corps  était  abso- 
lument inclus  dans  le  corps  vitré,  la  voie  d'extraction  était 
toute  tracée  :  c'était  la  plaie  d'introduction  restée  béante 
dont  l'exploration  fit  reconnaître  l'existence  et  la  situation 
du  corps  étranger,  et  au  travers  de  laquelle  il  put  être  extrait 
(Knapp  et  Berlin,  trois  cas).  Dans  un  cas,  M'Keown  dut  agran- 
dir l'orifice  traumatique  pour  pouvoir  enlever  le  fragment 
d'acier  et  le  cristallin  qui  était  opaque. 

Mais  presque  toujours  les  chirurgiens  ont  dû  se  frayer  une 
voie  pour  arriver  jusqu'au  corps  vulnérant.  Ce  premier 
temps  de  l'opération  a  beaucoup  varié,  suivant  les  conditions 
de  la  blessure  et  aussi  suivant  les  opérateurs. 

DeGrœfe,  dans  la  première  opération  de  cette  nature  qui  ait 
été  publiée,  enleva  tout  d'abord  le  cristallin  par  son  procédé 
d'extraction  de  la  cataracte,  ce  qui  lui  permit  de  voir  et  de 
saisir  le  corps  étranger  avec  des  pinces  introduites  par  son 
incision  cornéenne.  Cette  voie  d'extraction  n'est  plus  consi- 
dérée actuellement  que  comme  un  procédé  de  nécessité 
réservé  aux  cas  où  le  cristallin  a  été  frappé  d'opacité.  Il  a  été 
depuis  lors  mis  en  usage  trois  fois  seulement,  par  Crilchett, 
Berlin  et  par  Tlirschberg,  et  dans  les  deux  derniers  cas  l'œil 
s'est,  perdu. 

Même  alors  que  la  cataracte  traumatique  masquait  le  corps 
étranger  ou  rendait  les  manœuvres  de  recherches  difficiles, 
on  a  parfois  préféré  avoir  recours  au  second  mode  d'extrac- 
tion, à  la  voie  sclérolicale.  Ainsi  Schœler,  dans  le  cas  qui  fut 
couronné  d'un  aussi  magnifique  succès,  commença  par  pra- 
tiquer l'opération  de  la  cataracte;  et  ce  ne  fut  qu'après, lors- 
que la  transparence  rendue  aux  milieux  lui  eut  permis  de  voir 


EXTRACTION  DES  CORPS  ÉTRANGERS  DU  CORPS  VITRÉ.  45 

le  corps  flottant  dans  le  corps  vitré  qu'il  alla  à  sa  recherche 
par  une  incision  sclérolicale.  Prout,  quoique  le  cristallin 
fût  opaque  en  grande  partie,  se  servit.de  la  même  voie  pour 
chercher  et  saisir  l'éclat  de  ciseau  qui  avait  pénétré  dansl'œil, 
puis  il  enleva  à  la  curette  tout  ce  qu'il  put  enlever  du  cristallin. 

Somme  toute,  dans  l'immense  majorité  des  cas,  dans  20  ob- 
servations sur  30,  on  pratiqua  sur  la  sclérotique,  le  plus 
près  du  point  où  l'on  supposait  que  le  corps  étranger  se 
trouvait  placé,  une  incision  pour  servir  de  voie  d'introduc- 
tion aux  instruments.  Mais  cette  incision  peut  être  dirigée 
de  diverses  façons.  Avant  que  Berlin  eût  employé  une  section 
parallèle  au  bord  de  la  cornée,  située  à  quelques  millimètres 
en  arrière  de  celui-ci,  Desmarres  avait  pratiqué  sur  la  sclé- 
rotique une  incision  longitudinalement  dirigée,  suivant  un  des 
méridiens,  parallèle  par  conséquent  aux  bords  des  muscles 
droits  de  l'œil  qui  l'avoisinent.  Si  le  premier  procédé  a  été 
suivi  par  M'Keown,  et  par  Prout  dans  ces  derniers  temps,  le 
dernier  a  pour  lui  le  plus  grand  nombre  des  opérations 
récentes,  celles  de  Hirschberg,  de  Knapp,  de  Galezowski. 
Knapp,  particulièrement,  prit  vivement  sa  défense  en  faisant 
observer  que  l'incision  longitudinale  a  l'avantage  de  ne  point 
intéresser  en  travers  les  fibres  radiées  de  la  rétine  et  les  prin- 
cipaux vaisseaux  de  la  choroïde  et  qu'elle  permet  une  mise  au 
contact  plus  exacte  des  lèvres  de  l'incision  après  l'extraction. 
Il  nous  semble,  d'après  les  observations,  qu'elle  expose  moins 
que  l'incision  parallèle  à  la  cornée  à  l'issue  d'une  grande 
quantité  de  corps  vitré,  mais  qu'elle  donne  une  voie  un  peu 
moins  aisée  pour  les  recherches;  dans  plusieurs  cas  il  fut 
nécessaire  de  faire  bâiller  ses  lèvres  avec  des  pinces  pour 
extraire  le  corps  étranger.  Aussi,  dans  son  plus  récent  tra- 
vail, Knapp  a-t-il  transformé  cette  incision  longitudinale  en 
une  petite  section  à  lambeaux  qu'il  juge  plus  propre  à  faciliter 
l'introduction  des  instruments  et  l'extraction.  Nous  dirons 
tout  à  l'heure,  en  effet,  que  surtout  avec  l'aimant  il  arrivait 
parfois  que  le  corps  étranger  métallique,  quoique  déplacé, 
était  arrêté  au  niveau  de  l'incision  sclérolicale  par  le  con- 
tact d'une  des  lèvres  de  celle-ci. 


40  CORPS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 

Jusqu'au  moment  où  M'Kcown  eut  l'ingénieuse  idée  de 
mettre  en  usage  l'attraction  magnétique  pour  extraire  les  par- 
celles de  fer  ou  d'acier  introduites  dans  le  corps  vitré,  les  explo- 
rations et  la  saisie  du  corps  étranger  avaient  été  faites  avec  des 
pinces  fines  (pinces  à  irideclomie,  pince  d'Assalini,  pince  à 
capsule)  avec  des  crochets  mousses  ou  avec  la  curette;  souvent 
avec  ces  divers  instruments  successivement.  Quoique  les  opé- 
rateurs aient  cherché  à  déterminer  par  l'examen  ophtalmos- 
copique  avec  le  plus  de  précision  possible  le  point  où  sié- 
geait le  corps  étranger,  quoiqu'ils  se  soient  aidés  de  l'éclai- 
rage antérieur  au  cours  de  l'opération  dans  tous  les  cas  où 
celui-ci  permettait  de  percevoir  directement  le  reflet  métal- 
lique qui  traduisait  sa  présence,  ces  recherches  longues  et 
difficiles  étaient  souvent  conduites  un  peu  au  hasard;  aussi 
presque  toujours  a-t-il  fallu  des  tentatives  nombreuses,  le 
corps  étranger  saisi,  déplacé,  était  parfois  perdu  de  vue  et 
échappait  définitivement  à  l'opérateur  comme  cela  est  arrivé 
deux  fois  à  R.  Berlin,  qui  dut  laisser  les  opérations  inache- 
vées. Ces  recherches  multipliées  n'étaient  pas  sans  influence 
sur  l'inflammation  oculaire  consécutive  et  sur  l'insuccès 
fonctionnel  de  l'opération,  même  alors  qu'elle  avait  pu  être 
conduite  à  bonne  fin. 

Certains  chirurgiens  eurent  recours  dans  les  conditions 
difficiles  à  d'avantageuses  modifications  de  l'opération  et  leur 
conduite  pourrait  être  imitée  dans  des  cas  analogues.  Des- 
marres ne  pouvant  saisir  le  corps  étranger  lui-même,  enroula 
autour  de  ses  pinces  un  tractus  néomembraneux  qui  traver- 
sait le  corps  vitré  et  dont  l'extrémité  aboutissait  au  fragment 
de  capsule  qu'il  cherchait  à  enlever  :  la  traction  qu'il  exerça 
sur  ces  adhérences  amena  au  dehors  le  corps  étranger. 
Slevens,  avant  de  tenter  l'extraction,  fit  pénétrer  dans  le 
globe  oculaire,  à  travers  la  sclérotique  une  fine  aiguille,  juste 
en  avant  d'un  éclat  d'acier  qui  s'était  fixé  sur  la  réline  près  de 
Péquateùr  de  l'œil,  et  dont  il  avait  déterminé  la  situation  à 
l'ophtalmoscopc.  Se  guidant  sur  ce  conducteur,  il  put  arriver 
jusqu'au  corps  étranger  qu'il  obtint  en  excisant  un  petit  lam- 
beau de  la  rétine. 


EXTRACTION  DES  CORPS  ÉTRANGERS  DU  CORPS  VITRÉ.  47 

Quoique  l'emploi  de  ces  moyens  eL  l'usage  de  ces  instru- 
ments puisse  et  doive  rendre  encore  bien  des  services,  surtout 
lorsqu'il  s'agira  de  fragments  de  capsules,  de  grains  de 
plomb,  de  corps  autres  en  un  mot  que  les  éclats  de  fer  et 
d'acier,  quoiqu'ils  aient  été  mis  à  profit  récemment  encore 
par  Bull  et  par  Prout,  il  n'en  est  pas  moins  vrai  que  l'inven- 
tion de  M'Keown  a  fait  faire  un  progrès  considérable  à  cette 
question  de  thérapeutique  oculaire. 

L'on  sait  que  Fabrice  de  Ililden,  sur  les  conseils  de  sa 
femme,  s'était  servi  d'un  aimant  pour  retirer  une  parcelle 
métallique  qui  avait  pénétré  dans  la  cornée;  que  Morgagni 
chercha,  mais  en  vain,  par  ce  moyen,  à  extraire  d'un  abcès 
de  la  cornée,  un  éclat  de  fer  que  celui-ci  renfermait.  Cooper 
(The  Lancet,  1859)  en  introduisant  un  aimant  dans  la  chambre 
antérieure  en  fit  sortir  un  corps  étranger  analogue,  et  son 
exemple  fut  suivi  par  Rothmund  en  1873.  — D'autre  part, 
Dixon  avait  eu  l'idée  de  solliciter  un  éclat  d'acierperdu  dans 
le  corps  vitré  au  moyen  d'un  fort  aimant  approché  de  l'œil,  et 
le  déplacement  du  reflet  métallique  lui  ayant  démontré  que 
c'étaitbien  le  corps  étranger  qu'il  avait  en  vue,  le  chirurgien 
pu1,  l'extraire  avec  la  pince  d'Assalini.  Mais  personne  avant 
M'Keown  n'avait  songé  à  substituer  aux  recherches  faites 
dans  le  corps  vitré  avec  des  instruments  l'action  magnétique, 
sollicitant  le  corps  étranger  à  sortir  de  lui-même  en  quelque 
sorte  des  milieux  de  l'œil. 

Ce  ne  fut  pas  à  la  légère  et  par  hasard  que  l'opérateur 
irlandais  se  décida  à  se  servir  de  l'aimant.  Guidé  par  des 
considérations  théoriques,  il  s'était  livré  depuis  fort  long- 
temps à  des  expérimentations  sur  des  yeux  d'animaux.  Celles- 
ci  lui  démontrèrent  que  si  l'aimant  était  impuissant  à  attirer 
un  fragmentde  fer  etd'acier  au  travers  des  parties  encore  saines 
du  corps  vitré,  il  possédait  une  force  capable  de  lui  faire  tra- 
verser l'œil  d'une  extrémité  à  l'autre,  lorsque  le  traumatisme 
en  avait  romdu  les  cloisons  (/  found  il  would  draiu  métal 
Ihrourjh  broken-up  vitreous  fromoneside  oflheeye  lo  thcolher). 

Hirscliberg  dit  avoir  répété  dernièrement  ces  expériences 
(À'e  congrès  des  chirurgiens  allemands.) 


48  COUPS  ÉTRANGERS   MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 

L'innovation  de  M'Keown  ne  fut  pas  acceptée  sans  opposi- 
tion :  Knapp  dans  son  premier  travail  sur  l'extraction  des 
corps  étrangers  du  corps  vitré  lui  fut  peu  favorable.  Il  paraît 
aujourd'hui  un  de  sespartisans  convaincus, et  ses  observations 
jointes  à  celles  d'IIirschberg,  de  Frânkel,  de  M'Keown  èt  de 
M.  Galezowski,  nous  permettent  de  compter  neuf  cas  dans 
lesquels  l'attraction  magnétique  a  été  employée,  dont  huit  avec 
succès  opératoire,  c'est-à-dire  extraction  ducorps  métallique. 

Le  matériel  instrumental  néanmoins  n'est  plus  le  même. 
M'Keown  s'était  servi  d'un  aimant  simple,  tantôt  droit  tantôt 
courbé  en  fer  à  cheval  dont  les  branches  se  terminaient  en 
pointes;  tantôt,  enfin  des  pinces  aimantées.  Knapp  et 
Hirschberg  préfèrent  avoir  recours  à  l'électro-aimant.  Ici 
encore  les  instruments  et  les  constructeurs  ont  varié.  Hirsch- 
berg a  fait  fabriquer  par  le  constructeur  d'instruments 
Dorffel  un  électro-aimant  dontla  force  électromotrice  est  four- 
nie par  un  simple  élément  zinc-charbon;  les  fils  s'entourent 
en  spirale  autour  d'une  tige  de  fer  recourbée  et  se  terminent 
par  deux  pointes  d'inégales  dimensions.  Avec  cet  appareil, 
Hirschberg  peut  supporter  des  poids  de  50  et  de  1 00  grammes. 
Knapp  a  adopté  l'usage  d'un  instrument  analogue,  que 
quelques  expériences  lui  ont  fait  préférer  à  l'aimant  perma- 
nent imaginé  par  Grùning  pour  ce  but.  Ce  dernier,  construit 
sur  le  principe  de  la  batterie  magnétique  par  Reynders  (de 
New-York),  n'avait  encore  été  mis  en  expérience  que  sur  des 
yeux  de  porc  (E.  Gruening,  Magnet  for  theremoval  of  par- 
ticlesofsleel  and  iroti  from  the  interior  of  the  eye  présenté  à 
Y  Amer.  Med.  Associât.,  3  juin  1 880,  analysé  in  New-York 
Med.  Records,  1880,  t.  XVII,  p.  651  ;  et  New-York  Med.  Jour- 
nal, 1880,  p.  484. 

Ces  auteurs,  pour  justifier  la  préférence  qu'ils  ont  pour 
l'électro-aimant,  allèguent  sa  plus  grande  puissance  et  la 
possibilité  de  développer  et  de  suspendre  instantanément  sa 
force  attractive.  Ces  raisons  ne  nous  semblent  pas  valables  : 
un  aimant  est  toujours  assez  puissant  pour  attirer  quelques 
milligrammes  de  fer  ou  d'acier,  si  le  corps  qui  les  pèse  est 
réellement  libre  dans  le  corps  vitré;  dans  le  cas  contraire, 


EXTRACTION  DES  CORPS  ÉTRANGERS  DU  CORrs  VITRÉ.  49 

l'action  magnétique  la  plus  énergique  serait  impuissante. 
C'est  ce  que  prouvent  non  seulement  les  expériences  de 
M'Keown,  mais  l'examen  de  deux  de  nos  faits,  l'un  dû  à 
Knapp,  l'autre  à  M.  Galezowski.  Dans  l'un  et  l'autre,  le  corps 
étranger  était  maintenu  contre  la  rétine  par  des  adhérences 
inflammatoires  dans  le  premier  cas,  enclavé  dans  son  épais- 
seur dans  le  second.  Dans  l'un  et  l'autre,  l'inLroduction 
répétée  de  l'aimant  ne  put  l'entraîner  qu'après  que  par 
quelques  contacts  directs  on  fut  parvenu  à  détacher  ses  con- 
nexions et  à  le  libérer. 

Les  autres  observations  prouvent  surabondamment  que 
l'aimant  simple  suffit  à  entraîner  un  corps  étranger  libre, 
et  comme  la  simplicité,  la  finesse  des  instruments  est  la  pre- 
mière des  conditions  requises  quand  il  s'agit  de  manœuvres 
aussi  délicates,  il  nous  semble  qu'il  serait  préférable  de  s'en 
tenir  ainsi  que  M'Keown,  Frânkel,  M.  Galezowski  l'ont  fait, 
à  l'aimant  simple,  surtout  à  l'instrument  élégant  et  léger 
construit  par  M.  Collin,  d'après  les  indications  de  ce  dernier 
instrument  qui,  malgré  son  petit  volume,  peut  aisément  sup- 
porter un  poids  d'un  gramme  et  même  davantage. 

Il  ne  faudrait  pourtant  pas  croire  que  même  à  l'aide  de 
l'aimant  l'extraction  des  parcelles  de  fer  et  d'acier  du  corps 
vitré  soit  chose  facile.  M.  Galezowski  dut  s'y  reprendre 
quatre  fois,  Hirschberg  trois  fois,  Knapp  plusieurs  fois  éga- 
lement avant  d'entendre  le  bruit  de  cliquetis  métallique 
(bruit  qui  manque  parfois)  annonçant  que  le  corps  étranger 
était  venu  se  fixer  sur  l'aimant.  Puis,  nous  l'avons  dit,  au 
moment  où  le  corps  étranger  va  franchir  la  plaie  scléroticale, 
s'il  rencontre  une  de  ses  lèvres,  il  peut  y  rester  accroché. 
Dans  quelques  cas  il  a  fallu  l'en  retirer  avec  des  pinces 
(Knapp).  Dans  un  cas  de  Hirschberg  même,  l'action  magné- 
tique semontra  insuflisante  et  l'on  dut  aller  chercher  le  corps 
étranger  avec  des  pinces  après  avoir  extrait  le  cristallin 
opaque. 

Ainsi  l'attraction  de  l'aimant,  tout  en  fournissant  un  utile 
secours  aux  autres  méthodes  d'extraction,  peutôtre  inefficace; 
elle  est  toujours  insuffisante  quand  le  corps  étranger  est  lixé  ; 


50  CORPS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 

elle  ne  s'applique  qu'à  un  nombre  de  cas  limités,  ceux  où  le 
corps  étranger  est  constitué  par  une  parcelle  de  fer  et  d'acier. 
En  revanche,  elle  paraît  admirablement  appropriée  à  ces 
derniers,  lorsque  le  corps  est  libre,  flottant  dans  l'humeur 
vitrée;  surtout  lorsque  sa  situation  exacte  ne  pourrait  être 
précisée,  et  que  les  recherches  avec  des  pinces  ou  des  crochets 
mousses  risqueraient  de  dilacérer  le  corps  vitré  au  hasard  et 
sans  résultat.  Dans  ce  cas,  c'est  le  corps  étranger  qui  peut  aller 
de  lui-même  se  fixer  sur  l'aimant  introduit  dans  le  vitréum  à 
une  distance  plus  ou  moins  grande  de  lui. 

Quelques  mots  en  terminant  sur  le  diagnostic  du  lieu  de 
fixation  du  corps  étranger.  L'éclairage  antérieur,  l'examen 
ophtalmoscopique  permettent  presque  toujours  de  préciser 
son  siège.  Quand  le  cristallin  est  opaque  et  qu'on  ne  peut 
avoir  recours  à  ces  explorations,  on  arrive  à  le  reconnaître 
parfois  par  la  sensibilité  plus  grande  de  la  sclérotique  et  par 
l'injection  du  globe  oculaire  au  point  correspondant,  mais 
ces  dernières  indications  sont  bien  vagues  et  l'on  ne  peut 
guère  fonder  sur  elles  le  choix  du  lieu  où  l'on  doit  opérer. 

Un  Américain,  Thomas  R.  Pooley  (de  New-York),  a  récem- 
ment eu  l'idée  de  faire  servir  la  déviation  de  l'aiguille  ai- 
mantée à  cette  détermination  (On  the  détection  of  the  pré- 
sence and  location  of  steel  and  iron  forcing  bodies  in  the 
eye  by  the  indication  of  a  magnetic  needle,  in  Archives  of 
Ophlhalmology  de  Knapp  et  Hirschberg,  sept. 1880,  p:  225). 
Il  a  surtout  voulu  mettre  en  lumière  ce  fait  que  la  déviation 
de  l'aiguille  aimantée,  dont  on  observe  le  maximum  au  point 
précis  où  la  parcelle  de  fer  est  la  plus  voisine  de  la  surface 
de  l'œil,  s'était  accrue  lorsque  le  corps  étranger  lui-même 
était  transformé  en  un  aimant.  Pour  atteindre  ce  but,  il 
suffit  d'approcher  un  très  fort  aimant  du  poiul  où  l'on 
suppose  que  le  corps  étranger  est  inclus  et  de  l'y  laisser 
quelque  temps  en  permanence.  Celte  idée  avait  été  suggérée 
à  l'auteur  par  un  précédent  travail  de  M.  Alfred  Suree, 
publié  en  1 8 44,  dans  le  Médical  Times  and  Gazette.  Il  en 
a  vérifié  l'exactitude  dans  de  nombreuses  expériences,  et  bien 
que  sa  découverte  soit  déduite  de  considérations  scientifiques 


EXTRACTION  DES  CORPS  ÉTRANGERS  DU  CORPS  Y1TRÉ.  51 

un  peu  abstraites,  il  nous  semble  que  dans  le  cas  où  un  frag- 
ment d'acier  ou  de  fer  perdu  dans  le  corps  vitré  ne  serait  pas 
accessible  aux  autres  procédés  d'investigation,  on  pourrait, 
pour  en  déterminer  le  siège,  avoir  recours  à  un  des  appareils 
délicats  que  Thomas  R.  Pooley  a  construits  et  dont  nous  ne 
pouvons  malheureusement  que  mentionner  la  description  et 
les  effets. 

Nous  conclurons  de  cette  longue  analyse  à  laquelle  nous  a 
conduit  la  discussion  du  cas  communiqué  par  M.  Galezowski 
que,  d'après  les  observations  publiées,  l'extraction  des  corps 
étrangers  perdus  dans  le  corps  vitré  peut  et  doit  être  tentée  ; 

Qu'elle  peut  être  efficace,  c'est-à-dire  qu'elle  peut  conserver 
la  vue  de  l'œil  blessé  —  mais  dans  des  cas  forts  rares  ;  mais 
que  le  plus  souvent  elle  ne  laisse  qu'un  degré  restreint  et 
même  insuffisant  de  vision  ; 

Que  son  succès  final  et  le  rétablissement  des  fonctions  dé- 
pendent :  l°de  l'étendue  des  lésions  immédiates  des  milieux 
et  des  membranes  de  l'œil  ;  —  2°  des  phénomènes  inflamma- 
toires qui  se  développent  et  évoluent  dant  l'œil  sous  l'influence 
de  l'iritation  produite  par  le  séjour  du  corps  étranger;  — 
3°  des  troubles  de  même  nature  soit  préexistant  à  l'extraction 
du  corps  étranger  et  persistant  après  elle,  soit  tardivement  dé- 
veloppés qui  se  traduisent  le  plus  souvent  par  une  iridocyclite 
entraînant  la  perte  de  l'œil; 

Que  même  dans  les  cas  où  l'opération  ne  rétablit  pas  la  vue, 
elle  peut  mettre  le  blessé  à  l'abri  de  l'ophtalmie  sympathique; 
mais  que  cette  sauvegarde  n'est  pas  absolue,  et  que  souvent 
il  a  fallu  avoir  ultérieurement  recours  à  l'énucléation  ou  à 
l'énervation  de  l'œil  duquel  on  avait  retiré  le  corps  étranger; 

Que  ces  résultats  malheureux  sont  en  trop  grand  nombre, 
et  que  l'apparition  des  accidents  qui  marquent  cette  ter- 
minaison fatale  est  assez  reculée  souvent  pour  qu'il  faille  ne 
se  prononcer  qu'avec  une  extrême  réserve  sur  le  résultat 
d'une  opération  récente. 

Enfin  le  manuel  opératoire  lui-même,  au  sujet  duquel  nous 
avons  déjà  présenté  plus  haut  quelques  conclusions,  nous 
paraît  avoir  bénéficié  de  l'emploi  de  l'atLraction  magnéLiquc 


52  CORPS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 

exercée  au  travers  d'une  incision  scléroticale,  lorsque  le  corps 
étranger  est  de  nature  à  se  laisser  attirer  par  un  aimant. 

L'observation  du  docteur  Galezowski  se  trouvant  repro- 
duite in  extenso  dans  ce  rapport,  nous  n'avons  plus  qu'à 
vous  proposer  d'adresser  à  l'auteur  les  remerciements  de  la 
Société  pour  sa  très  intéressante  communication. 

DISCUSSION 

M.  Desprès.  — Je  dirai  un  mot  pour  appuyer  la  remarque  de 
M.  Berger,  au  sujet  du  peu  de  temps  écoulé  depuis  l'opéra- 
tion faite  au  malade  de  M.  Galezowski.  Ce  n'est  pas  dix-huit 
jours  après  l'extraction  que  l'on  peut  affirmer  que  la  guérison 
existe. 

Nous  avons  l'expérience  de  l'opération  de  la  cataracte  par 
la  sclérotique,  elle  a  donné  de  mauvais  résultats. 

J'ai  vu  un  enfant  qui  avait  une  plaie  de  la  sclérotique  faite 
par  un  couteau;  il  guérit  sans  complication;  la  compression 
du  globe  oculaire  était  effectuée  par  la  paupière  supérieure 
gontlée.  Dix-sept  jours  après  l'accident  on  eût  pu  croire  à  la 
guérison,  la  vision  était  conservée,  l'enfant  lisait. 

Mais  les  plaies  de  la  sclérotique  peuvent  entraîner  une 
perte  de  l'œil  par  l'atrophie. 

Plus  d'un  an  après,  cei  enfant  avait  une  hémorragie  intra- 
oculaire  et  en  un  mois  l'œil  s'atrophia. 

Une  plaie  chirurgicale  faite  sur  la  sclérotique  expose  aux 
mêmes  conséquences  qu'une  plaie  accidentelle  :  il  ne  faut 
donc  intéresser  la  sclérotique  que  dans  le  cas  d'absolue  né- 
cessité, et  ne  le  faire  pour  enlever  un  corps  étranger  que 
lorsqu'il  menace  d'amener  une  ophtalmie  sympathique. 

M.  Giraud-Teulon.  — Je  commencerai  par  féliciter  M.  Ber- 
ger de  son  excellent  rapport  et  par  dire  que  je  m'associe  à  se 
conclusions. 

C'est  avec  raison  qu'il  a  recommandé  le  procédé  de  M.  Pau- 
let  pour  la  recherche  exacte  du  lieu  où  est  le  corps  étranger, 
de  sa  direction. 

J'ai  assisté  un  confrère  dans  l'extraction  d'un  cyslicerque 


EXTRACTION  DES  CORPS  ÉTRANGERS  DU  CORPS  VITRÉ.  53 

de  l'œil,  on  le  voyait  bien  et  quand  on  voulait  le  prendre  avec 
lapince, il  setrouvaitquerinslrument  enélaitàplusieurs  milli- 
mètres, parce  quel'on  ne  serendail  pas  biencompte  de  ladistance. 

Quand  le  corps  étranger  est  une  paillette  de  fer,  c'est  un 
procédé  excellent  que  de  rechercher  les  données  de  l'aiguille 
aimantée. 

11  est  à  regretter  que  dans  ce  cas  particulier  l'opérateur  ait 
été  obligé  de  faire  des  recherches  avec  sa  pince,  de  racler  la 
réline;  ces  manœuvres  exposent  l'œil  à  des  complications  ;  le 
procédé  de  M.  Paulet  eût  dû  être  employé. 

Il  est  nécessaire  d'attendre  un  an  et  plus  pour  bien  savoir 
quel  sera  l'état  de  la  vision. 

M.  Gillette.  —  J'ai  relaté  dans  Y  Union  médicale  plusieurs 
cas  extraits  des  journaux  étrangers  et  du  genre  de  celui  de 
M.  Galezowski. 

Dans  un  cas,  on  pouvait  redresser  le  corps  étranger  en  ap- 
prochant un  électro-aimant  de  la  cornée;  le  corps  retombait 
quand  on  éloignait  l'aimant. 

Les  résultats  obtenus  par  les  chirurgiens  anglais  dans 
l'extraction  des  corps  étrangers  de  l'œil  ne  sont  pas  bons. 

Si  c'est  la  première  fois  qu'en  France  le  procédé  de  l'ai- 
mant est  employé  pour  l'extraction  d'un  corps  étranger  de 
l'œil,  il  a  été  déjà  mis  en  pratique  pour  rechercher  les  corps 
étrangers  d'autres  régions.  En  1850,  au  Gros-Caillou,  M.  Lan- 
celier  s'en  est  servi  pour  un  corps  étranger  de  la  peau. , 

M.  Berger.  —  Dans  une  observation  deSchôller,  de  1877, 
le  corps  étranger  se  déplaçait  quand  on  approchait  un  aimant 
de  l'œil,  ce  qui  a  permis  l'enlever  plus  facilement. 

On  s'est  servi  encore  de  l'aimant  pour  déterminer  la  direc- 
tion de  corps  étrangers  placés  dans  les  tissus;  par  exemple, 
pour  rechercher  une  aiguille  placée  sous  la  peau,  on  l'a 
aimantée  en  frictionnantla  peau  avec  un  aimant;  puislecorps 
étranger  une'fois  aimanté  on  a  pu,  par  la  déviation  de  l'ai- 
guille d'un  galvanomètre  connaître  la  direction  du  grand 
axe  du  corps  étranger. 

(Extrait  du  Bulletin  de  la  Société  de  chirurgie, 
1881,  p.  715). 


5-4  CORPS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 

Les  objcclions  qui  m'ont  été  faites  par  les  honorables 
membres  de  la  Société  de  chirurgie  portent,  comme  on  a  pu 
voir,  sur  ce  point  que  l'observation  était  encore  trop  ré- 
cente pour  qu'on  puisse  se  prononcer  d'une  manière  posi- 
tive sur  le  résultat  de  l'opération.  Les  mêmes  réserves  ont 
été  faites  aussi  par  le  rapporteur  de  la  commission,  M.  P.  Ber- 
ger. 

Des  modifications  se  sont  produites,  en  effet,  dans  l'état  de 
l'œil  de  notre  blessé,  mais  elles  n'ont  aucun  rapportavec  mon 
opération,  car  la  plaie  scléroticale  est  restée  complètement 
fermée  et  cicatrisée,  et  la  guérison  des  membranes  internes 
de  l'œil  ne  s'est  point  démentie.  Ce  qui  est  arrivé  chez  notre 
malade  c'est  l'opacificalion  du  cristallin,  resté  d'abord  trans- 
parent pendant  plus  de  quatre  mois  malgré  la  blessure  due  au 
morceau  de  fer,  qui  l'avait  traversé  de  part  en  part,  et  qui 
s'est  ensuite  opacifié  complètement  et  d'une  manière  assez 
rapide.  La  cataracte  n'avait  commencé  à  se  former  que 
vers  le  commencement  de  septembre  1881,  et  en  novembre 
de  la  même  année  j'ai  pratiqué  l'extraction  de  sa  calaracle 
avec  un  plein  succès. 

Le  malade  a  recouvré  une  acuité  visuelle  normale  et 
à  l'aide  des  lunettes  convexes  de  15  D.  il  peut  lire  len°l 
de  l'échelle. 

A  l'examen  ophtalmoscopique  fait  le  3  avril  1885,  j'ai  pu 
constater  que  la  papille  optique  est  complètement  saine;  dans 
la  région  temporale  du  fond  de  l'œil  on  aperçoit  une  large 
plaque  exsudalive  d'une  teinte  bleu  grisâtre,  située  sur  le 
fond  blanc  de  la  sclérotique  dénudée,  et  entourée  d'amas 
nombreux  pigmentaircs.  Cette  tâche  correspond  au  point  ou 
était  situé  le  morceau  de  fer,  et  où  j'avais  fait  l'incision  et  la 
suture  scléroticale.  Le  champ  visuel  dans  la  partie  corres- 
pondante à  celte  tâche  est  complètement  perdu,  mais  le  sco- 
tome  est  éloigné  de  plus  de  quatre  centimètres  du  point  de 
fixation,  ce  qui  fait  que  l'acuité  visuelle  centrale  reste 
complètement  intacte. 

Voici  du  reste  les  détails  de  cette  nouvelle  opération. 


EXTRACTION  DES  CORPS  ÉTRANGERS  DU  CORPS  VITRÉ.  55 


ORSERVATION 

Détails  complémentaires  sur  Vèlat  de  la  vue  du  malade  L..., 
à  qui  f  ai  retiré  un  corps  étranger  de  la  rétine. 

M.  L...,  après  l'extraction  du  corps  étranger,  ne  souffrait 
plus,  il  continuait  de  se  servir  cle  son  œil  et  avait  repris  son 
travail  comme  par  le  passé.  Une  l'ois  tous  les  huit  ou  dix 
jours,  il  venait  me  voir  à  ma  clinique;  l'œil  était  toujours 
sain  et  ne  présentait  aucune  trace  d'irritation.  Les  milieux 
de  l'œil  étaient  transparents,  sauf  la  partie  interne  du  cris- 
tallin, à  l'endroit  du  passage  du  corps  étranger,  qui  restait 
opaque  et  cette  opacité  s'étendait  à  travers  la  lentille,  mais 
dans  la  partie  assez  éloignée  de  l'axe  optique. 

Le  20  septembre  de  la  même  année,  le  malade  est  venu 
se  plaindre  d'un  trouble  de  la  vue  de  l'œil  blessé,  qui  s'est 
déclaré,  dit-il,  depuis  huit  jours;  ce  trouble  a  marché  si 
rapidement,  que  le  jour  de  sa  visite  il  voyait  à  peine  à 
compter  les  doigts.  En  l'examinant,  j'ai  constaté  que  c'était 
la  cataracte  qui  s'était  développée,  elle  était  en  apparence 
demi-molle,  et  presque,  complètement  formée.  Le  champ  vi- 
suel était  conservé  partout,  excepté  à  la  partie  supéro-interne. 
J'ai  proposé  l'opération,  le  malade  y  a  consenti  de  sorte  que 
le  29  novembre  1881,  j'ai  fait  l'extraction  de  la  cataracte  par 
en  haut. 

L'opération  a  parfaitement  réussi,  l'œil  a  guéri,  et  le 
malade  voyait,  à  la  date  du  '11  février  1882,  par  conséquent 
trois  mois  après  l'opération,  le  n°  1  de  l'échelle  avec  le 
verre  convexe  de  '15  dioptries  associé  au  verre  cylindrique, 
de  2,25  dioptries,  axe  horizontal. 

On  voit  par  ces  détails  supplémentaires  de  l'observation, 
que  la  guérison  des  membranes  internes  de  l'œil,  que  nous 
avons  obtenue  par  l'extraction  de  la  paillette  de  fer  avec  l'ai- 
mant s'est  maintenue  au  bout  d'un  an,  telle  que  nous  l'avons 
annoncé  à  la  Société  de  chirurgie.  S'il  est  survenu  une 
cataracte  quelques  mois  après  la  blessure,  elle  était  à  prévoir, 
car,  il  est  rare  de  voir  une  cristalloïde  blessée  se  cicatriser 
complètement.  Tout  au  contraire,  il  arrive  le  plus  habituelle- 
ment que  l'humeur  aqueuse  continue  à  s'infiltrer  peu  à  peu 
à  travers  la  plaie  capsulairc  dans  les  masses  cristallines,  et 
amène  tôt  ou  tard  leur  opacification,  et  c'est  ce  qui  a  eu 
lieu  chez  notre  malade. 


50    ,  CORrS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 

J'ai  rapporté  dans  mon  Traité  iconographique  d'ophtal- 
moscopie  un  autre  cas  de  blessure  de  l'œil  avec  une  figure 
chromolilhographiée  (fig.  2,  pl.  XVI),  où  Ja  présence  d'un 
corps  étranger  au  milieu  de  la  choroïde  atrophiée  et  d'un 
amas  pigmenlaire  avait  entraîné  une  oblitération  complète 
de  l'artère  centrale  de  la  rétine,  probablement  par  un  pro- 
cessus thrombosique.  Il  est  plus  que  probable,  que  si  immé- 
diatement après  l'accident,  on  avait  enlevé  le  corps  étranger 
avec  un  aimant,  les  accidents  thrombosiques  ne  seraient  point 
arrivés,  et  la  vue  de  cet  œil  aurait  été  conservée. 

VIII.  —  Mode  opératoire  pour  extraire  le  corps  étranger 
métallique  de  l'intérieur  tle  l'œil  à  l'aide  d'un  aimant. 

Cette  question  a  été  admirablement  étudiée  par  M.  Paul 
Berger  dans  le  rapport  qu'il  a  fait  à  la  Société  de  chirurgie, 
et  que  nous  avons  reproduit  plus  haut.  Après  avoir  passé  en 
revue  toutes  les  observations  publiées  parles  auteurs  etana- 
lysé  successivement  tous  les  modes  opératoires,  il  fait  cette 
déduction,  que  tantôt  on  s'est  servi  de  la  plaie  d'introduc- 
tion lorsqu'elle  était  béante,  comme  cela  avait  été  fait  par 
Berlin  et  Knapp;  tantôt  (M'Kweon)  on  a  dû  agrandir  la 
plaie  d'entrée. 

Dans  quelques  cas  rares,  lorsque  le  cristallin  est  blessé  et 
opacifié  complètement  du  premier  abord,  on  devra  se  servir 
de  la  plaie  cornéenne  qu'on  pratiquera  pour  extraire  le  cris- 
tallin, et  introduire,  à  l'exemple  de  de  Grœfe,  de  Critchett 
et  de  Hirschberg  les  instruments  extractifs  a  travers  cette 
plaie.  Mais  je  dois  ajouter  que  cette  voie  est  la  plus  éloignée  du 
corps  étranger  et  par  conséquent  la  moins  commode  pour 
son  extraction  ;  on  ne  doit  y  avoir  recours  que  dans  des  cas 
tout  à  fait  exceptionnels.  Et  il  est  bien  préférable  d'agir  à 
l'exemple  de  Schôller,  en  faisant  d'abord  l'extraction  de  la 
cataracte  et  cherchant  ensuite  à  retirer  le  corps  étranger  à 
travers  une  incision  faite  exprès  dans  la  sclérotique. 

Mais  la  voie  la  plus  favorable  pour  l'extraction  des  corps 


OPÉRATION  POUR  L'EXTRACTION  A  L'AIDE  D'UN  AIMANT.  57 

étrangers  qui  ont  pénétré  dans  le  corps  vitré  et  se  sont  logés 
soit  dans  la  rétine,  comme  cela  a  eu  lieu  dans  mon  cas,  soit 
qu'il  se  trouve  perdu  au  milieu  de  l'humeur  vitrée,  c'est  la 
voie  qu'on  pratique  dans  la  sclérotique. 

C'est  ainsi  que  nous  avons  procédé  jusqu'à  présent,  et 
nous  la  considérons  comme  la  seule  pratique  et  exposant 
relativement  moins  à  de  grandes  pertes  du  corps  vitré. 
Mais  quelle  est  la  forme  à  donner  à  cette  incision  et  quel 
est  son  point  d'élection?  Telles  sont  les  questions  que  nous 
croyons  nécessaire  de  résoudre  dans  ce  travail. 

1°  Quel  est  V endroit  qui  doit  être  de  préférence  choisi  pour 
V incision  scléroticale!  C'est  à  tort,  croyons-nous,  que  Berlin 
et  Prout  ont  pratiqué  une  incision  transversale  dans  la  partie 
antérieure  de  la  sclérotique,  au  voisinage  et  parallèlement 
au  bord  cornéen.  En  pratiquant  une  incision  très  près  de  la 
cornée  et  dans  une  direction  transversale,  on  produit  une 
grande  et  longue  plaie  qui  intéresse  dans  tout  son  trajet  le 
cercle  ciliaire,  et  compromet  ainsi  très  gravement  la  nutri- 
tion de  l'œil  tout  entier.  L'atrophie  du  globe  oculaire  doit 
être  la  conséquence. 

La  meilleure  direction  qu'on  puisse  donner  dans  les  extrac- 
tions des  corps  métalliques  de  l'œil  à  l'aide  d'un  aimant,  est 
une  plaie,  faite  parallèlement  aux  muscles  droiLs,  comme  cela 
a  été  du  reste  très  bien  exposé  par  M.  le  Dr  Berger.  Il  faut 
que  la  plaie  soit  portée  autant  que  possible  en  arrière  du 
globe  oculaire,  et  éloignée  le  plus  possible  de  la  région 
du  cercle  ciliaire.  C'est  la  partie  équatoriale  du  globe  qui 
doit  être,  dans  ces  cas,  choisie  de  préférence  et  c'est  dans 
celte  région  que  je  pratique  toujours  mon  incision.  Elle 
doit  être  de  préférence  située  au-dessus  du  diamètre  hori- 
zontal, par  conséquent  entre  le  droit  supérieur  et  le  droit 
externe.  L'incision  doit  avoir  une  étendue  de  un  centimètre 
et  quart  à  un  centimètre  et  demi,  ce  qui  permettra  à  l'ai- 
mant d'attirer  facilement  le  morceau  d'acier  sans  que  la 
plaie,  par  coaplation,  le  retienne  dans  l'œil.  Certainement, 
une  plaie  aussi  étendue  expose  à  une  sortie  trop  grande  du 
corps  vitré,  mais  étant  placée  dans  l'hémisphère  supérieur, 


58  CORrS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 

il  y  a  moins  à  craindre  une  perte  trop  notable  de  ce 
liquide,  qui  se  reproduit,  du  reste,  assez  facilement  une  fois 
que  la  plaie  se  trouve  réunie. 

L'incision  doit  être  pratiquée  avec  le  couteau  de  de  Graefc; 
on  fera  d'abord  une  ponction  perpendiculairement  à  la 
sclérotique,  dans  le  point  qui  marque  la  limite  postérieure  de 
l'incision,  et  on  fera  ensuite  l'incision  elle-même  en  allant 
d'arrière  en  avant  jusqu'à  la  limite  antérieure.  Dans  cette 
incision  on  doit  éviter  d'entamer  le  cercle  ciliaire  autant  que 
possible,  mais  il  faut,  d'autre  part,  chercher  à  s'éloigner 
attentivement  de  la  macula,  car  la  rétraction  que  subit  la 
choroïde  après  l'incision  et  le  processus  inflammatoire  qui 
s'étend  tout  autour  de  la  plaie,  pourraient  gagner  la  macula 
et  compromettre  le  résultat  délinilif.de  l'opération.  Le  lieu 
d'élection  que  nous  avons  indiqué  remplit  dans  ces  cas  les 
conditions  nécessaires  pour  éviter  ces  complications. 

Relativement  à  l'instrument  qui  doit  être  employé  pour 
l'extraction  du  corps  étranger,  je  partage  complètement  l'avis 
de  M.  Paul  Berger,  qu'il  n'y  a  point  nécessité  d'avoir  recours 
à  des  électro-aimants  aussi  puissants  que  ceux  dont  se  sert 
M.  Hirchsberg,  et  qui  peuvent  supporter  50  à  100  grammes. 
De  simples  sondes  fortement  aimantées  suffisent  pour  attirer, 
comme  dit  Berger,  quelques  milligrammes  de  fer  ou  cV acier, 
si  le  corps  qui  les  pèse  est  réellement  libre  dans  le  corps  vitré; 
dans  le  cas  contraire,  X action  magnétique  la  plus  énergique 
serait  impuissante.  Nous  avons  montré1  quelle  est  la  forme  à 
donner  à  la  sonde  qui  doit  servir  à  l'extraction  de  ces  corps 
étrangers.  Si  après  la  première  tentative  le  corps  ne  vient 
pas,  il  faudra  alors  promener  la  sonde  sur  le  fond  de  l'œil 
lui-même,  dans  tous  les  sens,  comme  nous  avons  fait  chez 
notre  malade;  alors  on  arrivera  à  déplacer  le  corps  étranger, 
à  le  déchatonner,  après  quoi  l'aimant  pourra  l'entraîner  faci- 
lement au  dehors. 

Le  docteur  Siméon  Snell2  vante  beaucoup  l'appareil  éleclro- 

1.  Voyez  p.  000. 

2.  Siméon  Snell,  The  Magnet  and  Electro-magnct  in  Ophlhalmologic  {Ont. 
Med.  Juurn.,  nov.  1883). 


EXTRACTION  DES  CORPS  ÉTRANGERS  DE  LA  CHOROÏDE.  59 

• 

magnétique;  il  l'a  employé  dans  vingt  et  un  cas,  et,  sur  ce  nom- 
bre, il  n'a  eu  que  deux  insuccès. 

Nous  pensons  aussi,  que  dans  quelques  cas  exceptionnels 
les  appareils  magnétiques  puissants,  tels  que  celui  de  Ilirsch- 
berg  ou  de  Siméon  Snell,  peuvent  être  utilement  employés 
dans  certains  cas  spéciaux,  lorsque  le  corps  étranger  est  long 
ot  difficile  à  se  détacher. 

L'application  d'une  suture  sur  la  plaie  scléroticale  est 
indispensable;  elle  doit  être  faite  avec  une  aiguille  courbe, 
très  fine,  que  l'on  introduira  sur  un  bord  de  la  plaie  de 
dehors  en  dedans,  pour  ressortir  ensuite  sur  l'autre  bord  de 
dedans  en  dehors.  Il  est  préférable  de  se  servir  ici  des  fils, 
fins  de  catgut,  car  on  peut  les  laisser  sur  place,  sans  qu'on" 
ait  besoin  d'allei»les  retirer  au  bout  de  quelques  jours. 

IX.  —  Corps  étrangers  de  la  choroïde. 

En  parlant  de  l'extraction  des  corps  étrangers  de  l'humeur 
vitrée  et  de  la  rétine,  nous  avons  souvent  exprimé  notre  opi- 
nion sur  l'état  de  la  choroïde  dans  ces  sortes  de  traumatisme. 
Il  est  rare  en  effet  que  cette  membrane  reste  intacte;  dans 
la  grande  majorité  des  cas,  c'est  dans  la  choroïde  et  la  rétine 
que  les  corps  métalliques  se  trouvent  fixés,  et  par  conséquent 
ce  que  nous  avons  dit  relativement  à  l'extraction  des  corps 
étrangers  de  la  rétine  et  du  corps  vitré  se  rapporte  de  tous 
points  à  la  choroïde  et  nous  n'avons  pas  besoin  d'y  revenir. 

X.  —  Conclusion. 

De  tout  ce  long  travail,  que  nous  avons  consacré  à  l'emploi 
de  l'aimant  dans  l'extraction  des  morceaux  de  fer  qui  pénè- 
trent dans  l'œil,  il  résulte  ce  fait  incontestable  : 

1°  Que  l'opération  en  elle-même  est  réellement  utile. 

2°  Qu'elle  peut,  et  doit  être  pratiquée  toutes  les  fois  que 
les  milieux  de  l'œil  ne  sont  pas  très  notablement  altérés,  et 


60  CORPS  ÉTRANGERS  MÉTALLIQUES  DE  L'ŒIL. 

qu'il  n'y  a  point  de  suppuration  des  membranes  internes  de 
l'œil. 

3°  Les  instruments  aimantés  sont  aussi  très  utiles  dans  l'ex- 
traction des  corps  étrangers  fixés  dans  l'iris  ou  le  cristallin, 
car  à  l'aide  de  ces  instruments  on  peut  aller  hardiment  à 
leur  recherche  sans  crainte  de  les  voir  tomber  derrière  l'iris 
et  se  perdre  dans  le  cercle  ciliaire,  ce  qui  amènerait  inévita- 
blement la  fonte  purulente  du  globe  oculaire,  comme  je  l'ai 
vu  se  produire  dans  plusieurs  autres  cas  où  l'aimant  n'a  pas 
été  employé. 

4°  Quant  aux  corps  étrangers  de  la  cornée,  les  instruments 
ordinaires  peuvent  suffire  généralement,  mais  il  y  a  des  caï 
dans  lesquels  l'éclat  de  fer  est  tellement  rapproché  de  la 
membrane  de  Descemet  qu'il  peut  pénétrer  dans  la  chambre 
antérieure,  si  l'aiguille  ou  la  pince  dont  on  se  sert  pour  l'ex- 
traire n'est  pas  aimantée  et  ne  l'attire  pas  au  dehors  pendant 
l'opération. 

5°  Dans  les  corps  étrangers  en  fer  ou  en  acier  qui  se  trouvent 
dans  le  corps  vitré  ou  dans  une  autre  membrane  interne  de 
l'œil,  il  faut  se  servir  des  sondes  aimentées  et  au  besoin 
d'éleclro-aimants. 

6°  L'introduction  d'instruments  aimantés  doit  se  faire  de 
préférence  à  travers  une  incision  scléroticale,  faite  en  arrière 
du  cercle  ciliaire,  parallèlement  et  dans  l'intervalle  des  muscles 
droits,  externe  et  supérieur. 


BIBLIOGRAPHIE 


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treous, in  the  one  with  a  scierai  flap  section,  in  the  other 
with  a  magnet.  Remaries  (Archiv  oj  Ophthalmology,  juin  1880, 
p.  207). 


62  BIBLIOGRAPHIE. 

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innernn  mit  Hulfe  des  Electromagneten  (Bericht  ueber  die 
Verhandlung  d.  deutschen  Gessellschafl  f.  Chirurgie,  X,  con- 
grès 1881,  p.  20.) 

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t.  VII,  p.  651). 

Thomas  Pooley.  On  the  détection  of  the  présence  and  location  of 
steel  and  iron  forcign  bodies  in  the  eye,  by  the  indication  of 
a  magnetic  needle(Archiv.  of  Ophtalmol.  of  Knapp  a.  Hirsch- 
berg, 1880,  p.  225. 

Alfred  Surée.  Médical  Times  and  Gazette,  1884. 

James  Minou.  American  Ophthalm.  Society,  July  1885  (The  Mé- 
dical Records). 

Dufour.  Revue  médicale  de  la  Suisse  nom ade,  juillet  et  septembre 
1885. 

Knapp.  Ophthalm.  Society,  juillet  1885,  p.  13. 

Hirschberg.  Der  Electromagnet  in  der  Augenheilkunde,  1885. 

Galezowski.  Blessure  de  la  cornée,  de  l'iris  et  du  cristallin,  par 
un  éclat  de  fer  qui  s'est  logé  sur  la  rétine.  Extraction  au 
moyen  d'une  sonde.  Guérison  (Bulletin  de  la  société  de  chi- 
rurgie, 1881). 

Paul  Berger.  Rapport  sur  la  communication  du  Dr  Galezowski 

(Société  de  chirurgie,  1881). 
Galezowski.  De  l'extraction  des  corps  étrangers  métalliques  de 

l'œil  à  l'aide  d'un  aimant  (Recueil  d'ophthalmologie),  1885. 

p.  513,  584  et  641. 


TABLE  DES  MATIÈRES 


I.  —  Extraction  des  paillettes  de  fer  de  la  cornée   2 

II.  —  Extraction  des  paillettes  de  fer  de  l'iris   5 

III.  —  Extraction  des  paillettes  de  fer  de  la  conjonctive   10' 

IV.  —  Extraction  des  corps  étrangers  de  la  sclérotique  '. . . .  11 

V.  —  Extraction  des  paillettes  de  fer  du  cristallin   14 

VI.  —  Extraction  des  paillettes  de  fer  du  corps  vitré   18 

VII.  — ■  Extraction  des  morceaux  de  fer  de  la  réline   27 

Rapport  de  M.  Paul  Berger  à  la  Société  de  chirurgie   32: 

VIII.  —  Mode  opératoire  pour  extraire  le  corps  étranger  métallique 

de  l'intérieur  de  l'œil  à  l'aide  d'un  aimant  : . . .  55 

IX.  —  Extraction  des  corps  étrangers  de  la  choroïde   59 

X.  —  Conclusion   59- 

Bibliographie   61 

Table  des  matières   63 


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Bouuloton.  —  Imprimeries  réunies,  B.